Abdul Mutallab était arrivé début août 2009 à Sanaa où il avait obtenu un visa pour s'inscrire dans un cours de langue arabe. Il avait aussi rompu les ponts avec sa famille qui avait trouvé son attitude suffisamment suspecte pour qu'en novembre dernier son père, un riche banquier décide d'informer l'ambassade américaine au Nigeria des affinités inquiétantes de son fils pour le terrorisme islamiste.
Le département d'Etat assure aujourd'hui que les informations du père n'étaient pas suffisamment précises pour que son visa pour les Etats-Unis soit annulé. Reste à savoir si son séjour yéménite a vraiment été l'occasion d'un entraînement dans les rangs d'al-Qaïda ou bien s'il a choisi cette destination pour des raisons familiales, puisque sa mère est yéménite.
Les enquêteurs américains ne sont encore sûrs de rien, même si al-Qaïda a revendiqué l'action d'Abdul Mutallab, évoquant l'expérimentation d'une nouvelle technique d'explosifs mise au point dans la péninsule arabique et félicitant le « frère nigérian» pour avoir franchi les barrières de sécurité et brisé le mythe du renseignement américain, ajoute le communiqué diffusé sur internet.
Pour Washington, le Yémen est un front important de la lutte contre le terrorisme.
C'est un pays en voie de déstabilisation rapide où persiste une tentation séparatiste au Sud et où les autorités ne parviennent pas à venir à bout d'une rébellion chiite au Nord malgré l'aide militaire de l'Arabie Saoudite voisine et celle des Etats-Unis.
C'est aussi la terre d'origine de la famille d'Oussama ben Laden. Un enjeu très fort pour le père fondateur d'al-Qaïda qui maintient sur place des groupes structurés et dûment équipés. Alors qu'ailleurs, on peut parler de nébuleuse al-Qaïda et d'affinités idéologiques, au Yémen, il existe bel et bien une organisation.
Les Américains n'oublient pas qu'en octobre 2000, ils ont perdu dix-sept hommes dans l'attentat contre leur bâtiment Uss Cole, dans le port d'Aden. Les Yéménites étaient également nombreux dans les camps d'entraînement afghans où se préparait le 11-Septembre.
Aujourd'hui, avec l'équipée du Nigérian Abdul Muttallab, la question se pose de savoir si le Yémen est aussi devenu non seulement une place-forte, mais aussi une base de rayonnement pour al-Qaïda, en Afrique notamment.