Cela fait près de dix ans que Leila de Lima, qui figurait en 2017 dans le classement des 100 personnalités les plus influentes au monde du magazine Time, traque Rodrigo Duterte. Cela avait commencé quand, à la tête de la commission philippine des droits de l'homme, la sénatrice avait ouvert une enquête sur les affirmations selon lesquelles il aurait créé des escadrons de la mort à Davao, la grande ville du Sud dont il a longtemps été le maire.
La Cour pénale internationale (CPI) vient de lancer des « examens préliminaires » sur la très meurtrière « guerre contre la drogue » que le président philippin a déclenchée après son élection à la présidence en 2016. « Je vois le jour où la justice triomphera, j'espère ce jour, a-t-elle déclaré à l'AFP dans un entretien dans le QG de la police nationale à Manille, où elle est détenue. Les investigations préliminaires déboucheront sur une inculpation » de la CPI.
La sénatrice avait été arrêtée le 24 février 2017 en raison d'accusations selon lesquelles elle aurait été corrompue par des trafiquants de drogues détenus quand elle était ministre de la Justice (2010-2015) sous l'ex-président Benigno Aquino.
« Elle n’est en prison qu'à cause de son combat »
Malgré son arrestation il y a un an, Leila de Lima continue d’être une des critiques les plus virulentes de la guerre contre la drogue du président Duterte aux Philippines. Une détention qui inquiète Amnesty International, pour qui Leila de Lima est « une prisonnière d’opinion ».
Contactée par RFI, Rachel Choa Howard, spécialiste des Philippines à Amnesty International, assure que la sénatrice n’est en prison « qu'à cause de son combat, et parce qu’elle est Leila de Lima ». Selon elle, il semblerait que les procédures judiciaires qui la visent « soient volontairement ralenties », ce qui serait une « tentative d’empêcher la sénatrice de participer à la vie publique ».
Et Leila de Lima ne serait pas la seule dans cette situation. « C’est un traitement que subissent aussi d’autres défenseurs des droits aux Philippines : de Lima a été particulièrement ciblée, mais le président Duterte a menacé d’autres défenseurs des droits humains qui critiquaient son administration et particulièrement sa guerre contre la drogue. Il les a menacés en public, il a menacé de les abattre, poursuit Rachel Choa Howard. Il semble donc que le gouvernement philippin soit plus intéressé par faire emprisonner ses critiques que par faire en sorte que la police n’abatte pas des milliers de gens, des pauvres en majorité. »
Amnesty International réclame aujourd'hui sa « libération immédiate ».
(Avec AFP)