Indonésie: la circulation d’informations déformées perturbe la vie politique

En Indonésie, les « fake news », informations volontairement fausses qui circulent sur les réseaux sociaux, n’ont pas épargné l’élection en cours du gouverneur de Jakarta dont le premier tour a eu lieu la semaine dernière. Dans le pays à majorité musulmane le plus peuplé au monde, le candidat sortant, issu de la minorité chrétienne, a notamment été la cible favorite des contre-vérités sur la toile, lors d’une campagne où la religion a joué un rôle clé.

De notre correspondant en Indonésie,

Avant la campagne de dénigrement dont il a été victime, le gouverneur sortant de Jakarta était en tête des intentions de vote et semblait pouvoir retrouver son siège. Mais tout cela, c’était avant que ses opposants ne l’accusent de blasphème, une accusation qui a mené à des manifestations géantes au cœur de la capitale et a même conduit le chrétien devant les tribunaux indonésiens pour insulte supposée à l’islam. Le tout, sur la base, notamment, d’une vidéo devenue virale sur Facebook.

Pour faire simple, le candidat y affirmait que certains de ses opposants mentaient en utilisant à mauvais escient une sourate du Coran, pour appeler à voter contre lui. La vidéo a ensuite été éditée et sous-titrée de manière a laissé entendre que c’est la sourate, elle-même, qui était mensongère. D’où les accusations de blasphème qui ont suivi.

De nombreuses fausses informations indonésiennes circulent sur le web

Ces informations concernent en particulier la Chine – la superpuissance régionale – et les Chinois. Elles concernent aussi par ricochet le gouvernement indonésien, accusé par ces rumeurs relayées en ligne, de servir aveuglément les intérêts de Pékin. Outre certains fantasmes sur le déferlement massif de millions de travailleurs chinois dans l’archipel, de nouveaux billets de banque indonésiens imprimés depuis le mois de décembre ont ainsi par exemple bénéficié de leur propre campagne de désinformation. Ces nouvelles roupies ont ainsi été accusées de ressemblance troublante avec le yuan chinois, pour étayer des théories complotistes.

Il est difficile de mesurer l’impact exact de ces contre-vérités volontaires dans un pays où près de la moitié des 250 millions d’habitants utilisent activement les réseaux sociaux, et donc, parallèlement, s’y informent. Mais ce qui est certain, c’est que ce problème de fausses informations en ligne est pris très sérieusement par les autorités.

L’auteur du sous-titrage très approximatif de la vidéo sur le gouverneur sortant est actuellement poursuivi pour incitation à la haine. Une campagne de sensibilisation, dite « anti-hoax », a été, elle, officiellement lancée. De son côté, le conseil des Oulémas d’Indonésie, puissante instance religieuse, est allée jusqu’à publier une fatwa contre la diffusion de fausses informations, accusées d’exacerber les tensions ethniques et religieuses à travers l’archipel.
 

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