De notre correspondant à Jakarta,
La campagne pour prendre la tête de la capitale a été notamment marquée par deux images, toutes les deux liées à la figure du gouverneur sortant. La première, c’est la marée blanche qui a déferlé deux fois, en novembre puis en décembre, sur le centre de la capitale indonésienne.
Tensions exacerbées
Une vague composée de militants islamistes radicaux, qui réclament à grands cris l’emprisonnement du gouverneur actuel, un chrétien d’origine chinoise, surnommé Ahok. Le week-end dernier, à nouveau, environ 100 000 d’entre eux se sont réunis au cœur de Jakarta pour prier, cette fois-ci, contre l’élection d’un non-musulman.
La seconde image marquante, et qui contraste fortement avec la foule compacte de ses opposants, c’est l’apparente solitude du candidat Ahok face à ses juges, lors de son procès pour blasphème. A l’automne, au début de la campagne, Ahok était encore largement en tête des intentions de vote.
A ce moment-là, il a critiqué l’interprétation du Coran faite par certains de ses opposants politiques pour appeler à voter contre lui, un non-musulman. Ceux-ci en ont alors profité pour laisser entendre que c’est le Coran lui-même que le candidat insultait.
Un scrutin-test
Un montage volontairement malhonnête, une vidéo qui laissait entendre le même son de cloche et qui est devenue virale sur Facebook, a achevé de pousser la masse des musulmans radicaux dans la rue pour réclamer l’incarcération du gouverneur pour cause de blasphème. Une pression populaire à laquelle les institutions n’ont pas su résister, et qui a conduit au procès en cours.
Au vu du contexte, certains analystes affirment que cette élection est un test déterminant pour l’avenir de la tolérance interreligieuse en Indonésie. Dans un premier temps, ce scrutin doit permettre de mesurer l’influence réelle des extrémistes musulmans, qui ont activement fait campagne contre le candidat sortant, proche du pouvoir.
Le rapport de force est d’autant plus important que la mairie de Jakarta est souvent considérée comme un marchepied vers le pouvoir suprême en Indonésie. L’élection du gouverneur semble ainsi représenter une sorte de répétition générale pour les différents partis en place, dans l’attente de l’élection présidentielle qui aura lieu d’ici deux ans.