Fuite des Rohingyas: l'angoisse des proches restés en Birmanie

Ils sont encore plus de 2 000 en mer, des Rohingyas musulmans et des Bangladais sur des embarcations au large des côtes de Malaisie et d’Indonésie. Ils fuient les persécutions et la pauvreté. Plusieurs pays d’Asie du Sud-Est ont entrepris des opérations de sauvetage. La Birmanie, pour la première fois, a remorqué vers ses côtes un navire avec 300 réfugiés à bord. Mais dans les camps de déplacés d’où partent ces migrants, beaucoup de familles restent sans nouvelles de leurs proches qui sont encore en mer aux mains des passeurs.

Avec notre envoyé spécial dans l'Arakan, sur la côte birmane, Rémy Favre

Au camp de Say Tha Mar Gyi, Fatima se morfond dans son abri de bambou, où elle vit depuis trois ans. Deux de ses sœurs et l'une de ses filles ont pris la mer il y a cinq semaines. « Ce sont là les vêtements de ma sœur. Et là, ceux de ma fille. Elles sont parties en Malaisie », lâche-t-elle dans un sanglot.

Depuis leur départ, Fatima n’a aucune nouvelle de ses proches, explique-t-elle : « Elles ont dit que peu leur importait de mourir en mer. Au camp, elles n’avaient pas assez de vêtements, pas assez de riz. Quand elles m’en demandaient, je me demandais bien où je pourrais en trouver pour elles.. J’ai quatre autres enfants et deux autres sœurs dont je dois m’occuper. Je n'ai pas de mari. Comment est-ce que je peux faire pour m’en sortir ? »

Son ex-conjoint aimerait racheter leur fille aux passeurs qui la détiennent sur un bateau. « Si j’avais de l’argent, je demanderais à ceux qui sont revenus des bateaux comment ils ont fait et je ferais pareil pour ramener ma fille, confie Fatima. Ceux qui sont revenus ont dû payer 700 dollars pour trois ou quatre personnes. Mais moi, je n’ai même pas de quoi m’acheter une cigarette. »

D’autres familles se sont endettées pour racheter leurs proches bloqués en mer. Les migrants qui ont réussi à revenir affirment avoir été battus par les passeurs. Les trafiquants leur donnaient des rations alimentaires à peine suffisantes pour survivre.

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