L'annulation des discussions n'est pas le premier soubresaut de ce type, rappelle notre correspondante à Hong Kong Florence de Changy. Ce dialogue avait été proposé jeudi dernier, à quelques minutes de la fin de l'ultimatum imposé par les manifestants au gouvernement chinois pour obtenir la démission du chef de l'exécutif local. Ensuite, vendredi soir, les manifestants avaient décidé de suspendre le dialogue. Ils estimaient que la police n'avait pas fait son travail, notamment lors d'attaques contre plusieurs de leurs campements. Puis le dialogue fut relancé, avant de rencontrer des problèmes de médiateur.
Cette fois, c'est le gouvernement chinois qui a annulé les discussions. Motif : les étudiants ont lancé un grand appel à la mobilisation générale ce vendredi 10 octobre dans l'après-midi. Le régime a donc estimé que le climat n'était pas propice aux négociations. Il faut dire qu'il y a des pressions fortes, pour que les différents secteurs de la vie hongkongaise reprennent. La balle est donc dans le camp de Pékin, analyse notre correspondante à Pékin Heike Schmidt, car seule une nouvelle décision du comité permanent de l’Assemblée populaire nationale pourrait changer la donne à Hong Kong.
Un recul de Pékin semble peu probable
C'est elle, la plus haute instance chinoise, qui avait octroyé en août dernier la fameuse réforme électorale aux Hongkongais, permettant l’élection du chef de l’exécutif au suffrage universel en 2017, mais à condition que les candidats soient présélectionnés en amont. Retirer cette réforme, ou l’amender, paraît néanmoins fort improbable, car Pékin veut à tout prix éviter de perdre la face dans ce bras de fer avec la jeunesse hongkongaise.
Ce vendredi matin, l’agence officielle Chine nouvelle cite un expert en ces termes : « Le dialogue ne peut pas avoir lieu tant que les étudiants ne reviennent pas dans le cadre légal. » Un commentaire largement diffusé cette semaine dans la presse officielle, qui estime qu’il faut punir les organisateurs occupant le quartier d'affaires Central, et pardonner aux jeunes qui se sont faits « utiliser et ensorceler » par un petit groupe de meneurs. Selon l'éditorialiste, Hong Kong est le plus grand bénéficiaire de la croissance chinoise, et ses habitants auraient tout intérêt à s’aligner sur le continent.
■ TÉMOIGNAGE
Avant même l'annulation de la rencontre, annoncée jeudi, le député hongkongais Lee Cheuk-yan, du Parti des travailleurs, n'était pas optimiste : « Nous pensons que la décision n’est pas prise à Hong Kong. Tout doit être décidé par la Chine. C’est la Chine qui bloque la démocratie à Hong Kong. Si le gouvernement chinois ne fait pas de concessions, la désobéissance civile continuera. »
Le député hongkongais ajoute : « Nous avons besoin d’un accord négocié avec le gouvernement de Pékin sur la réforme politique. Nous savons que c’est difficile. Mais si vous voyez les centaines de milliers de personnes qui sont descendues dans la rue, c’est très encourageant, cette participation à ce mouvement d’occupation. C'est quelque chose qui ne s’est jamais produit depuis notre soutien aux manifestants pro-démocratie chinois en 1989. Et tous ces gens sont des jeunes. Les vieux vont mourir, et les jeunes gagneront cette cause. Nous sommes du côté de l’histoire, en faveur de la démocratie. »