Le Japon remanie sa doctrine pacifiste

Le gouvernement japonais a pris ce 1er juillet une décision historique qui remanie sa doctrine pacifiste et permettra à l'armée nippone de participer désormais à des opérations militaires extérieures, et user de la force dans des activités de maintien de la paix de l'ONU. Cette réinterprétation de la Constitution pacifiste japonaise est sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Le texte doit maintenant être examiné par le Parlement.

Avec notre correspondant à Tokyo, Frédéric Charles

Le Premier ministre Shinzo Abe ne révise pas sa Constitution pacifiste par laquelle le Japon renonce à la guerre pour résoudre des conflits. C’est bien trop long et compliqué. Il la réinterprète pour permettre à l’armée japonaise, d’une taille comparable à celle de la Grande-Bretagne, de participer à un système de défense collective pour venir en aide à des alliés comme les Etats-Unis mais aussi les Philippines, voire le Vietnam, confrontés comme lui à de dangereuses disputes territoriales avec la Chine.

Le spectre de la guerre

L’armée japonaise pourra aussi utiliser la force dans des missions de maintien de paix de l’ONU, ce qu’elle ne peut pas faire actuellement. Selon des sondages, la moitié des Japonais sont opposés à cette réinterprétation de la Constitution pacifiste. Ils craignent que leur armée soit entraînée dans des guerres menées par les Etats-Unis partout à travers le monde.

Ce n’est pas le cas. Les conditions d’interventions de l’armée japonaise resteront très restrictives. Il n’empêche qu’avec cette réinterprétation, le Japon se donne la possibilité de faire la guerre pour préserver la paix, même s’il n’est pas lui-même attaqué. Déjà la Chine réagit en déclarant que le Japon joue avec le spectre de la guerre.    

La colère de Pékin

« Le Japon a ouvert la boîte de Pandore », s’inquiète le China Daily. Le Global Times lui dénonce les « intentions diaboliques des conservateurs » japonais et publie une caricature du Premier ministre Shinzo Abe déguisé en Rambo, brandissant son arme à feu. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires Etrangères Hong Lei se montre à peine plus diplomatique : « La politique militaire du Japon a une influence non seulement sur l’avenir de ce pays, mais aussi sur la sécurité de toute la région asiatique. Nous appelons le Japon à prendre la voie de la paix et du développement, de traiter avec prudence les affaires concernées, de prendre en considération les inquiétudes justifiées des pays voisins et de ne pas porter atteinte à la sécurité de la région. Sur le fait que le Japon change sa constitution pacifiste, la Chine a déjà fait part de ses inquiétudes, en demandant de ne pas saboter l’autorité et la sécurité de la Chine ». Si l’on en croit Pékin, le Japon inquiète à nouveau le monde, mais il serait inutile de compter sur l’opinion internationale pour mettre en garde Tokyo. L’éditorialiste du Global Times se montre bien pessimiste : « Les Etats-Unis et les autres pays occidentaux n’ont aucune intention de stopper le Japon. »

                       

Partager :