Cristina Ortega, ambassadeur des Philippines: «l’estimation de l’ONU est excessive»

Six jours après le passage du typhon, l'aide internationale a du mal a être acheminé dans les zones les plus touchées. Cristina Ortega, l'ambassadeur des Philippines en France, revient sur les difficultés rencontrées par les secours et la « guerre des chiffres » autour du bilan humain entre l'ONU et Manille. 

RFI : L’ONU estimait dans un premier temps le bilan humain à 10 000 victimes mais le président philippin Benigno Aquino a parlé mardi de 2 000 à 2 500 morts pour la ville de Tacloban. Comment expliquez-vous ce décalage ?

Cristina Ortega : Le typhon Haiyan, est le cyclone tropical le plus fort de l’histoire moderne. C’est pour cela qu’il y a une grande dévastation aux Philippines dans les villes de Visayas, notamment Leyte, Tacloban, Cebu, Bohol, Iloilo, Guimaras et Palayan. Selon les chiffres officiels que nous avons reçus mercredi, il y a déjà 1798 décès à Tacloban et sur les quelques îles touchées par le typhon.

Selon vous, l’estimation de l’ONU est excessive ?

Oui, c’est un peu excessif. Les chiffres que je donne, ce sont des chiffres officiels envoyés mercredi.

On est donc encore au stade de l’évaluation des dégâts, du bilan humain. Ne craignez-vous pas qu’en donnant un bilan inférieur à l’estimation des Nations unies, le président Aquino ne décourage la mobilisation qui est en train de monter ?

Ce sont des chiffres officiels que nous avons reçus. Mais peut-être y a-t-il encore des estimations qui n’étaient pas inclues, ici, par d'autres îles qui sont affectées.

Pour quelles raisons l’aide tarde-t-elle à arriver aux populations ? On entend, ici, que des renforts ont été envoyés par de nombreux pays, un porte-avions américain, des Marines, des soldats... Et pourtant on a du mal à atteindre les zones les plus touchées dont celle de Tacloban.

Les zones très très affectées sont des îles dans le centre des Philippines et comme ce sont des îles, il y a toujours des difficultés de transport. Nous avons des contraintes logistiques, surtout dans ces zones reculées. C’est difficile de rétablir les lignes de communication et de dégager des passages. Les postes d’électricité sont tombés, les équipements des satellites sont détruits.

Comment accélérer le processus ? Est-il possible de savoir quand les communications coupées depuis le passage du typhon pourront être rétablies ?

Le président de la République a mobilisé toutes les forces de l’ordre dans les zones touchées pour l’évacuation des gens les plus vulnérables, parce qu’il y a des enfants, des personnes âgées. Et comme l’aide de la nourriture ou d’eau n’était pas arrivée, il faut les évacuer. Ce sont les choses que nous avons faites pour le moment. Il y a aussi les pays, comme par exemple les Etats-Unis, qui se trouvent dans le Pacifique, qui ont envoyé des navires pour nous aider. Pour le moment, de la nourriture et de l’eau sont arrivées dans quelques villes et quelques îles des Philippines. A Tacloban en particulier, parce que c’est la plus ville touchée.

En quantité suffisante ?

Non, pas du tout. Heureusement, le typhon est parti. C’est mieux pour transporter les aides.

Les Philippines sont coutumières des catastrophes naturelles. Avant le passage de Haiyan, des centaines de milliers de personnes avaient été évacuées et pourtant aujourd’hui encore, on compte des dizaines de milliers de sans-abri. L’Etat investit-il suffisamment dans l’amélioration de l’habitat ?

Même si l’habitant était solide, c’était impossible d’arrêter le typhon. Le vent était très puissant. Tout d’un coup en cinq minutes, il y avait tellement d’eau. 

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