Bangladesh: peine capitale pour un haut dirigeant islamiste

Nouvelle condamnation à mort ce mardi 17 septembre au Bangladesh dans le procès des responsables des crimes de guerre commis pendant la guerre d'indépendance en 1971 contre le Pakistan. Abdul Quader Mollah est le 4e plus haut leader du plus important parti islamiste du pays, le Jamaat-e-Islami ; il a été condamné en première instance en février dernier à la perpétuité par le Tribunal international des crimes, mais la Cour suprême a aggravé sa peine et seule une grâce présidentielle pourra lui éviter la mort.

Abdul Quader Mollah est surnommé « le boucher de Mirpur », du nom d'une banlieue de Dacca où les milices pro-pakistanaises al-Badar dont il faisait partie, ont massacré environ 350 civils, dont des dizaines de médecins, d'enseignants et de journalistes qui ont été torturés et assassinés. Mollah a également été condamné pour avoir décapité un poète et violé une fillette de onze ans. En tout, il a été reconnu coupable de cinq des six chefs d'inculpation qui pesaient contre lui. C'était l'un des principaux opposants au mouvement d'indépendance du Pakistan oriental, qui deviendra cinq ans plus tard le Bangladesh.

Les forces paramilitaires sont accusées de nombreux crimes de guerre. On estime entre 300 000 et 500 000 le nombre de victimes de cette guerre et c'est justement le Tribunal international des crimes (ICT), mis en place par le gouvernement en mars 2010, qui est chargé de les juger. Le tribunal est controversé pour deux raisons : le Jamaat-e-Islami dénonce une chasse aux sorcières. La Ligue Awami au pouvoir utiliserait le tribunal pour régler ses comptes avec ses adversaires politiques.

A l'évidence, tous les accusés, sans exception, sont d'anciens ou d'actuels responsables du Jamaat ou du BNP, le parti nationaliste du Bangladesh, le principal parti d'opposition dirigée par Khaleda Zia, l'ancienne Premier ministre et grande rivale de l'actuelle chef du gouvernement Sheikh Hasina. L'appellation de ce tribunal fait aussi polémique, car selon Human Rights Watch (HRW), les procédures du tribunal ne respectent pas les critères internationaux.

Deux camps qui s'affrontent

Ce n'est pas la première fois qu'un haut dirigeant du parti islamiste est condamné à la peine de mort. Depuis la création du tribunal, six membres du Jamaat-e-Islami sont passés devant les juges. Deux d'entre eux ont été condamnés à des peines de prison, et quatre à des peines de mort. Deux autres prévenus sont en attente de jugement.

Avant Abdul Quader Mollah, le Tribunal international des crimes avait condamné Ghulam Azam, 90 ans, un ancien haut dirigeant du Jamaat à une peine de quatre-vingt-dix ans de prison pour meurtre, torture et planification de génocide. Le verdict a rendu furieux les partisans du parti islamiste qui sont sortis en masse dans les rues de Dacca pour protester. Mais son verdict est aussi contesté par les mouvements laïcs qui exigent des peines bien plus lourdes, en l'occurrence la peine capitale.

Et à chaque nouvelle condamnation, le même scénario se reproduit, avec une radicalisation des pro et des anti-islamistes. Depuis le début de l'année, plus de 100 personnes sont mortes dans des heurts. Suite à la condamnation à mort d'Abdul Quader Mollah ce mardi 17 septembre, quelque 2 000 sympathisants du Jamaat-e-Islami sont descendus dans les rues de plusieurs villes, des heurts sporadiques ont éclaté dans la capitale Dacca. Pour protester contre le verdict, le Jamaat a appelé à une grève de quarante-huit heures.
 

 

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