Avec notre correspondante à Islamabad, Nadia Blétry
« Je donnerai moi-même une récompense de 100 000 dollars à celui qui tuera ce blasphémateur », a annoncé le ministre des Chemins de fer, samedi soir à Peshawar, la grande ville du nord-ouest du pays.
Avant d’appeler « les talibans et al-Qaïda à s’occuper de cette noble tâche ». Cette déclaration ne devrait pas être du goût des partenaires occidentaux du Pakistan, alliés officiels d’Islamabad dans la guerre contre le terrorisme depuis fin 2011.
Le gouvernement a pris ses distances avec les propos du ministre qui ne s’était, jusque là, illustré que par la gestion catastrophique des chemins de fer dans le pays.
Cette déclaration survient deux jours après des manifestations meurtrières, des protestations qui ont coûté la vie à plus de 20 personnes vendredi. Les autorités d’Islamabad avaient alors été vivement critiquées, car elles avaient décrété un jour férié pour célébrer l’amour du prophète et poussé la population à protester contre le film amateur américain.
Depuis la création du pays en 1947, les régimes successifs ont toujours joué l’apaisement à l’égard des religieux. Au Pakistan, l’élite n’hésite pas à instrumentaliser politiquement l’islam pour asseoir son pouvoir. Pour certains, le gouvernement a surtout livré la rue aux groupes radicaux. Samedi, de nouveaux rassemblements ont eu lieu dans le pays, mais se sont déroulés sans violence.
Dans le contexte tendu des protestations contre le film amateur américain et à l’heure ou l’hostilité à l’égard des Etats-Unis est à son comble, les déclarations du ministre des Chemins de fer n’ont en tout cas pas vocation à calmer les esprits.