Les victimes de la répression indemnisées par le gouvernement thaïlandais

Le gouvernement thaïlandais a décidé d’allouer l’équivalent de 49 millions d’euros à titre de compensation financière aux victimes de la violence politique depuis 2005. La plus grosse partie de cette somme ira aux familles qui ont perdu l’un des leurs lors des manifestations  de 2010, réprimées dans le sang par l’armée.

Avec notre correspondant à Bangkok, Arnaud Dubus

100 000 euros pour ceux qui ont perdu un membre de leur famille, 80 000 euros pour ceux qui ont perdu un bras ou une jambe, 4 000 euros pour les blessés légers. 

Le gouvernement de Yingluck Shinawatra estime que l’octroi de compensations financières massives est le meilleur moyen de favoriser la réconciliation nationale. Ces mesures concernent non seulement les « chemises rouges », partisans de l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, lesquelles avaient subi de plein fouet la répression militaire en 2010, mais aussi les « chemises jaunes », favorables à l’establishment conservateur, qui avaient paralysé certains quartiers de Bangkok et l’aéroport international en 2008.

Même si les sommes sont importantes, l’annonce est loin d’avoir soulevé l'enthousiasme unanime des familles des victimes. Phayao Akahat, la mère d’une infirmière tombée sous les balles des soldats en 2010, s’est dit scandalisée par le cynisme du gouvernement : « L’argent ne peut pas compenser la perte de ma fille ».

La mesure du gouvernement est ambigüe. Elle semble favoriser l’oubli sous prétexte de réconciliation nationale alors même que les responsabilités tant du côté des militaires, que de celui des politiciens et des militants n’ont pas encore été établies. La question est de savoir si une réconciliation peut intervenir en l’absence de justice.

Chemises rouges et chemises jaunes

Thaksin Shinawatra, frère de l'actuel Premier ministre Yingluck, a été Premier ministre de 2001 à 2008. Homme d'affaires et homme à poigne, sa popularité décroit après la révélation de premiers scandales financiers au début de l'année 2006. A la fin de cette même année, il est renversé par un coup d'État militaire alors qu' il se trouve à l'étranger. Début avril 2009, des manifestations monstres, menées par ses partisans,  les « chemises rouges » demandent son retour.  La répression est violente mais elle culminera quand les manifestants réclameront des élections anticipées en 2010.

Les « chemises jaunes »  portent la couleur symbole du palais royal thaïlandais. Elles s'érigent en défenseur de la patrie. En 2008, elles campent dans la rue pendant 192 jours avant de faire tomber le Premier ministre deux semaines plus tard. Les « jaunes » se dispersent. En novembre, elles reviennent occuper l’aéroport international de Bangkok. Leur mouvement obtient la dissolution du parti au pouvoir. On les a vu refaire surface au début de la crise frontalière avec le Cambodge en 2011.

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