Affaire Karachi : un témoignage évoque Sarkozy

Libération fait état dans son édition du lundi 2 janvier 2012 de nouveaux éléments dans le dossier de l'affaire Karachi. Selon le quotidien, un ex-haut fonctionnaire a déclaré devant le juge Van Ruymbeke que Nicolas Sarkozy aurait été informé de la création d'une société offshore au Luxembourg, destinée à permettre le versement de commissions à des intermédiaires dans le cadre de contrats d'armement.

Le témoignage de Gérard-Philippe Menayas réalisé devant le juge Van Ruymbeke tombe mal à quelques mois de l'élection présidentielle. Selon un procès verbal d'audition du 2 décembre dernier cité par Libération, cet ex-haut fonctionnaire qui était en 1994 directeur administratif de la DCNI, la branche internationale de la Direction des constructions navales, estime que le ministre du Budget de l'époque, à savoir Nicolas Sarkozy, était forcément au courant de la création de Heine, une société offshore basée au Luxembourg pour verser des commissions à des intermédiaires dans des contrats d'armement comme celui la vente au Pakistan de sous-marins Agosta, une procédure légale jusqu'en 2000.

Selon Gérard-Philippe Menayas, « il est clair que le ministère du Budget a nécessairement donné son accord pour la création de Heine… Vu l’importance du sujet, cette décision ne pouvait être prise qu’au niveau du cabinet du ministre ». Ces déclarations viennent appuyer les conclusions d'un rapport de la police luxembourgeoise datant du début de l'année 2010, selon lesquelles aussi Nicolas Sarkozy avait donné son accord pour la création de cette société.

Pas de réaction à l’Elysée

Il s’agit donc d’un témoignage important dans l'enquête menée par le juge Van Ruymbeke dans le volet financier de l'affaire Karachi, qui vise à tenter de déterminer s'il y a eu versement dans le cadre de ces contrats d’armement de rétrocommissions qui auraient permis le financement de la campagne électorale d'Edouard Balladur en 1995, campagne dans laquelle Nicolas Sarkozy occupait le poste de porte-parole.

L'Elysée n'a pas réagi à ces nouvelles déclarations mais Nicolas Sarkozy a toujours démenti avoir joué un quelconque rôle dans le financement de la campagne d'Edouard Balladur. Luc Chatel, le ministre de l’Education nationale, a lui incité à la prudence face à la publication de ces informations en déclarant : « C’est une affaire qui remonte à plus de vingt ans aujourd’hui. Il y a une enquête judiciaire qui est en cours. A chaque fois que le gouvernement était sollicité pour fournir des informations à la justice, il l’a fait… Attendons les faits et non pas de supposées déclarations via voie de presse ».

L’opposition demande des explications

Le porte-parole du Parti socialiste, Benoit Hamon, a lui estimé qu’il n’y avait pas de place pour le doute : « Sur des dossiers comme ceux-là, évidemment, le ministre de l’époque ne pouvait pas ne pas être au courant. » Quant à Pierre Moscovici, le directeur de campagne de François Hollande, principal adversaire de Nicolas Sarkozy s’il se présente à la présidentielle de 2012, il a affirmé : « Il faudra bien qu’un jour Edouard Balladur et Nicolas Sarkozy s’expliquent sur le financement de cette étrange campagne ou l’étrange financement de cette campagne. »

Une campagne qui ne fait que commencer et dans laquelle l’évolution de cette enquête sur l’affaire Karachi pourrait être source de rebondissements. Dans ce dossier, deux proches du président de la République ont déjà été mis en examen : Nicolas Bazire, ex-directeur de campagne d’Edouard Balladur et Thierry Gaubert, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, ainsi que Ziad Takieddine, un intermédiaire et Renaud Donnedieu de Vabres, un ex-conseiller de François Léotard alors ministre de la Défense.

 

 

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