Les titres ont déjà pour la plupart disparus des radios. Dans quelques jours, plusieurs centaines de ces morceaux, dont de nombreux tubes, auront disparu du web chinois. Les sites de diffusion tels que Youku (l’équivalent chinois de Youtube ou de Dailymotion censurés en Chine) ont jusqu’au 15 septembre pour se mettre en conformité, indique l’agence Chine Nouvelle.
Selon une circulaire du Ministère chinois de la Culture en date du 19 août dernier, ces chansons « portent préjudice à la sécurité de la culture d’Etat ». La liste actualisée samedi dernier comporte 300 titres. Voici donc trois exemples de ce que vous ne pourrez plus écouter en Chine :
Six chansons du dernier album de l’Américaine Lady Gaga font ainsi partie de cette nouvelle « black list » des DJ de la censure chinoise. Des chansons à textes évidemment comme ce clip des Backstreet Boys datant d’il y a déjà 12 ans où il est difficile de percevoir l’acte révolutionnaire derrière les déhanchements d’adolescents au sourire dentifrice et coiffés comme pour aller à la messe.
Même chose pour les Anglais de Take That –le groupe de Robbie William- ou les Canadiens de Simple Plan. Les choses étant plus évidentes en revanche pour Zhang Hui Mei, peut-être un peu moins extravertie que ses consœurs américaines mais tout aussi jolie et véritable star auprès de son public. La chanteuse taïwanaise est en froid avec Pékin depuis qu’elle a entonné l’hymne taïwanais lors de l’investiture de l’ancien président Chen Shui-bian en 2000. Or, pour les autorités chinoises, Taiwan fait partie intégrante de la Chine.
« Révolution culturelle Pop »
Ce nouveau listing a entrainé critiques et incompréhensions sur les forums. Les fans sont en colère. Sur le compte weibo –microblogs- de Lady Gaga Chine, un internaute se demande si la Chine est revenue à une « révolution culturelle dans la Pop ». Xu Ai Amei –visiblement un fan de Chang Hui Mei d’après son pseudo-, s’interroge de son côté sur ce que peut-être le « bon goût » pour les fonctionnaires du ministère de la Culture : « Katy Perry, Beyoncé, Lady Gaga, le gouvernement n’aime pas les chanteuses à Y » plaisante un autre. Certains ont même décidé de jouer les rebelles : « On est allé hier soir dans un KTV (karaoké) et on a chanté les chansons de Lady Gaga à tue-tête pour le souvenir. »
Chemises à fleurs, dreadlocks, Lin Zi affiche le sourire : « Je n’aime aucun de ces chanteurs alors ça me dérange pas, affirme ce vendeur chez un disquaire indépendant de la capitale. La censure est ici plutôt un acte de charité pour les oreilles du peuple chinois. Je préfère qu’on encourage des musiques comme le reggae plutôt que ces groupes de merde ». Le propos a le mérite d’être clair, même si rien ne dit aujourd’hui que les autorités chinoises vont un jour se mettre à adorer « I shot the Sheriff » de Bob Marley. « Moi j’aime bien les performances de Lady Gaga sur scène. Il y plusieurs morceaux sur le disque et on en entend seulement quelques uns à la radio, c’est dommage », regrette une jeune pékinoise non loin du magasin.
Avertissement aux microblogeurs
Depuis 2010, les autorités exigent que toutes les chansons diffusées sur les sites de musique en ligne reçoivent un accord préalable. La règle a été mise en place officiellement pour lutter contre le piratage. Elle vaut aussi pour les playlistes lors des concerts. Cette année, Bob Dylan n’a pas eu le droit de chanter certains de ses titres à commencer par le célèbre « Blowing In the wind » lors de ses concerts à Pékin et Shanghai.
Les autorités ont été refroidies par un concert de Bjork en 2008 à Shanghai. La chanteuse Islandaise n’avait pas hésité à scander le mot « Tibet » à la fin de sa chanson « Déclaration d’indépendance ». « Tibet, Tibet ! Don’t let them do that to you. Raise your flag » -Ne les laissez pas faire, levez votre drapeau-. Depuis évidemment, les chansons de Bjork ne sont plus les bienvenues sur le web chinois.
La censure vaut aussi enfin pour les programmes télévisés. Un programme d’été qui marchait très fort sur la chaîne du Hunan, Happy Camp, vient d’être déprogrammé alors qu’une interview de Lady Gaga était prévue dans un prochain épisode. Dans une directive initiale prise début janvier par le ministère, «Jingle Bell» figurait sur la liste noire sans plus de précisions. La liste a été considérablement élargie depuis. Ce qui pourrait laisser penser à un nouveau tour de vis sur le web.
Suite à la visite de responsables du Parti communiste dans leurs locaux, Sina.com et Youku ont lancé vendredi 26 août 2011 des avertissements à plusieurs millions de leurs adhérents les menaçant de suspendre leur compte s’ils venaient à propager de « faux reportages et des rumeurs ».