L’UE apporte une aide alimentaire d'urgence aux Nord-Coréens

La Commission européenne va octroyer une aide alimentaire urgente de 10 millions d’euros à la Corée du Nord suite à une grave pénurie alimentaire. Les contrôles devraient être sévères car les Européens veulent pouvoir vérifier que l’aide ira bien à ceux qui souffrent réellement de malnutrition.

L’aide alimentaire sera ciblée pour secourir 650 000 personnes qui souffrent d’une malnutrition aiguë, notamment les enfants de moins de cinq ans, ainsi que les femmes enceintes, les patients d'hôpitaux et les personnes âgées dans les provinces du nord et de l’est de pays.

Situation détériorée

La commissaire européenne en charge de l’Humanitaire, Kristalina Georgieva, a souligné que la situation s’est dégradée à un tel point que la consommation d’herbe est devenue une pratique quotidienne. Elle a évoqué une évolution spectaculaire de la famine depuis quelques mois dans les régions du nord et de l’est où de nombreux enfants sont gravement sous-alimentés dans des crèches et hôpitaux où aucun traitement n’est disponible.

En juin 2011, les rations alimentaires distribuées par l’Etat sont tombées en dessous de 150 grammes de riz par personne et par jour, soit un bol de riz, contre 400 grammes en avril. Le riz est devenu un produit de luxe pour une grande partie des Nord-Coréens.

La chaîne australienne de télévision ABC a diffusé des images filmées par un journaliste nord-coréen montrant des enfants orphelins en train de quémander de la nourriture sur les marchés, pour survivre. Un soldat affirme que la misère commence à toucher également l’armée. Il explique que la moitié des militaires est affaiblie pour cause de malnutrition. Tandis qu’un autre soldat déclare ne pas manger plus de 100 grammes de maïs par repas.

Climat défavorable et aide extérieure réduite

En marge de ces problèmes alimentaires chroniques, la Corée du Nord est
hautement vulnérable aux catastrophes naturelles telles que les inondations et
la sécheresse.

Cette dégradation brutale s’expliquerait par des facteurs climatiques défavorables qui ont conduit à des récoltes calamiteuses d’une part. L’institut Kwon Taejin du Korea Rural Economic confirme que la production de pommes de terre est catastrophique depuis deux décennies. D’autre part, la suspension de l’aide en provenance de Corée du Sud et la réduction de celle venant de la Chine ont également contribué à la pénurie chronique.

De 1995 à 2008, la Commission européenne a fourni environ 124 millions d'euros d'aide humanitaire à la Corée du Nord pour l'approvisionner en nourriture d'urgence, améliorer les services de santé et procurer un accès à l'eau potable et à des installations sanitaires.

La distribution sous surveillance

L’aide européenne sera déployée sous stricte supervision dès les prochaines semaines via un système de distribution centralisé et géré par les autorités.

Les modalités de fourniture de l’assistance alimentaire seront surveillées par les experts de la Commission européenne et les représentants du Programme alimentaire mondial (PAM) avec l’accord du gouvernement nord-coréen.

Les émissaires de l’UE et du PAM chargés de gérer cette aide humanitaire ont la promesse du régime nord-coréen de pouvoir accéder sans restriction là où ils le voudront pour effectuer des contrôles aléatoires afin de vérifier que l’aide arrive bien à ses destinataires.

Le PAM est autorisé à effectuer 400 visites par mois dans des entrepôts, des institutions pour enfants, des foyers, des hôpitaux, sur les marchés ainsi que sur les sites de distribution de nourriture.

Mme Georgieva a prévenu que si l’aide était détournée de ses destinataires, la Commission européenne n’hésiterait pas à mettre fin à son intervention humanitaire.

Le 25 juin dernier, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton avait également prévenu : la Corée du Nord devait d’abord offrir des garanties que l’aide atteindra bien les personnes dans le besoin. Les Etats-Unis ont suspendu leur aide en 2008, soupçonnant le régime de la détourner au profit des privilégiés, notamment l’armée, les membres de l’administration et les notables du régime.

Christian Ehler, député européen en charge des relations avec la péninsule coréenne, a estimé que les Américains veulent utiliser l’aide comme un moyen de pression pour favoriser une relance des discussions autour du dossier du nucléaire.

La décision européenne embarrasse Séoul, qui soupçonne aussi Pyongyang de vouloir détourner l’aide internationale pour refaire ses stocks d’ici à 2012, afin de célébrer avec faste le centenaire de la naissance de Kim Il-sung, fondateur de la dynastie au pouvoir en Corée du Nord.

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