L'ex-ministre des Affaires étrangères des khmers rouges, Ieng Sary, s'absente de son procès

Le deuxième jour du procès des quatre derniers hauts responsables du régime khmer rouge porte sur Ieng Sary, l'ancien chef de la diplomatie du régime de Pol Pot. Comdamné à la peine de mort par contumace, en 1979, Ieng Sary, 85 ans, a été amnistié en 1994, puis grâcié par décret royal en septembre 1996. Pour l'ancien dirigeant, ces amnisties rendent la procédure actuelle invalide à son égard. Il a quitté la salle d'audience dès ce mardi 28 juin 2011 au matin.

Avec notre envoyée spéciale à Phnom Penh

Ieng Sary est le premier concerné de cette deuxième journée de procès aux chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens (CETC) et il a quitté la salle d’audience parce qu’il avait mal au dos. Ses avocats ont donc poursuivi sans lui. Selon eux, le tribunal ne serait pas habilité à juger Ieng Sary car il l'a déjà été par contumace le 19 août 1979. Qui plus est, Ieng Sary a bénéficié d’une grâce du roi Sihanouk en septembre 1996. Les avocats de Ieng Sary estiment aussi que cette chambre n’a pas la compétence pour juger de la validité de cette grâce royale, seule une Cour constitutionnelle pourrait le faire.

Quant à la portée du décret royal, la défense estime que le roi du Cambodge n’a aucune limite quant à l’étendue de son pardon. Là-dessus, bien évidemment, l’accusation n’est pas d’accord. Les procureurs font valoir que la justice internationale ne reconnaît pas l’amnistie de crimes d’une ampleur tels que ceux commis du temps des khmers rouges.

Pour plaider la cause de leur client, les avocats de Ieng Sary font appel au contexte historique de 1979, rappelant que l’amnistie visait à obtenir la défection du dirigeant khmer rouge et la réintégration des rebelles.

L'ex-numéro deux khmer rouge Nuon Chea a également quitté la salle d'audience ce mardi 28 juin, mais il a assuré qu'il reviendrait « participer activement » quand son propre cas serait abordé.

Ieng Sary, alias Van, était ministre des Affaires étrangères du Kampuchéa démocratique et membre du Comité central et permanent du Parti communiste du Kampuchéa (PCK). Il est accusé d’avoir dirigé, encouragé, mis en œuvre ou apporté toute autre forme d’assistance à la politique et aux pratiques du PCK entre avril 1975 et janvier 1979, caractérisées par le meurtre, l’extermination, l’emprisonnement, la persécution ou autres actes inhumains tels que des transferts forcés de population, la réduction en esclavage ou le travail forcé.

Le 14 novembre 2007, Ieng Sary a été mis en détention provisoire avec sa femme Thirith et inculpé par les CETC pour crimes contre l’humanité (meurtre, extermination, emprisonnement, persécution et autres actes inhumains) et crimes de guerre (homicide, atteinte à l’intégrité physique, déportation ou transferts illégaux ou détention illégale de civils).

Plus de trente ans après les massacres qui ont coûté la vie à 1,7 million de Cambodgiens entre 1975 et 1979, quatre des principaux dirigeants du régime khmer rouge comparaissent devant -selon l'intitulé officiel, les Chambres extraordinaires des Tribunaux du Cambodge-, à Phnom Penh depuis le lundi 27 juin 2011.

Les anciens collaborateurs de Pol Pot devraient plaider non coupables dans ce procès prévu pour durer plusieurs années.

 

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À consulter :

. Arrestation de Khieu Samphan. Article et interview de Khieu Samphan. RFI 10/11/2007
. Kek Galabru, responsable d'associations cambodgiennes de défense des droits de l'homme. Entretien RFI 13/11/2007
. Duch, un tortionnaire khmer rouge face aux juges. Article RFI 16/2/2009
. Entretien de Henri Locard, historien spécialiste des khmers rouges sur le blog Les carnets de Phnom Penh (Libération)

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