De notre correspondante à Montréal,
Le constat de la vérificatrice générale chargée de traquer l’efficacité des programmes publics est sans appel. Le gouvernement néglige depuis plusieurs années de s’assurer de la qualité des cours censés franciser les nouveaux résidents. Résultat : seulement 9% des adultes qui suivent cette formation peuvent tenir une conversation de la vie quotidienne après près un an de cours.
Cela veut dire que 91 % s’avèrent incapables de comprendre ce que leur dit, par exemple, un propriétaire quand ils cherchent une location, ou qu’ils ne peuvent pas occuper un poste qui demande un minimum de communication. Selon les chiffres recueillis par la vérificatrice générale, 17% des personnes qui avaient commencé une formation l’ont abandonnée au bout de quelques semaines.
De nombreux abandons en cours de route
D’un point de vue économique, toute cette histoire se révèle être un véritable gaspillage, sans parler des conséquences pour les nouveaux arrivants auxquels on a fait miroiter qu’après leur francisation ils auraient accès à l’emploi de leurs rêves.
Plusieurs ministères contribuent aux programmes de francisation, mais il n’existe aucune communication entre eux. Certains défraient les immigrants pour se retrouver sur les bancs de l’école, d’autres non. Voilà pourquoi plusieurs familles misent sur un emploi immédiat, souvent peu rémunéré, car elles n’ont pas les moyens de vivre avec l’allocation minimum de l’Etat. Du coup, les gens abandonnent leur formation en cours de route.
Des tests jugés inadaptés aux réalités de terrain
Pendant plusieurs années, les gouvernements successifs ont réduit les subventions aux associations souvent chargées des cours, un choix qui se paye maintenant. Sans parler des aberrations administratives. Par exemple, le test pour classer les non-francophones dans une classe de leur niveau se donne en ligne, avec des questions à choix multiples.
Une réalité technologique qui ne correspond pas aux besoins d’immigrants parfois analphabètes, qui tombent parfois par hasard sur la bonne réponse. Résultat des courses, les cours regroupent des personnes aux réalités linguistiques souvent très différentes. Le ministre responsable promet de créer un service unique pour répondre précisément aux besoins des immigrants et aussi d’envoyer davantage ses fonctionnaires voir la façon dont les cours s’organisent sur le terrain.
Scènes surréalistes
Certaines scènes paraissent assez surréalistes, lorsque par exemple, des dizaines d’ouvrières d’usine d’origine asiatique sont amenées à suivre un cours de français au tableau dans une immense cafétéria, après avoir passé toute la journée à coudre des manches de veston. Il n'est pas certain que nombre d'entre elles aient réussi leur examen final.