Le reportage de notre correspondant à Quito, Eric Samson.
A Pedernales, ville rasée à près de 70%, les vendeurs font illusion. Installés sous des tentes, ils reprennent possession du centre-ville mais leurs stands de fortunes cachent mal les cicatrices héritées du tremblement de terre.
Dans les têtes pourtant les choses s’arrangent lentement selon Byron Aguilar de la Croix-Rouge. « De nombreuses ONG ont aidé, et des universités, notamment la partie psychosociale. On en avait besoin à Pedernales. La population était traumatisée, notamment les enfants lors des répliques, mais bon, peu à peu la peur disparaît », explique-t-il.
A une heure de route, la ville de Chamanga a aussi été sévèrement touchée. Maria Ortiz n’a toujours pas repris son travail à la recherche de coquillage dans la mangrove locale par peur d’un tsunami. Elle s’est installée avec dix membres de sa famille au bord de la route. « Nous, nous avons décidé en famille depuis le début de ne pas aller dans le campement officiel. Ma mère a de la tension, elle ne peut pas manger n’importe quoi et ils ne nous laissent pas cuisiner ce que l’on veut. On ne peut pas contrôler le cholestérol par exemple. En plus, c’est militaire, raconte-t-elle. On n’est pas libre de circuler comme on veut. Ici on peut aller acheter des médicaments à toute heure sans problème. »
Une aide humanitaire réservée aux camps officiels
Le problème, c’est que le gouvernement réserve l’aide humanitaire à ceux qui ont rejoint les campements officiels et qui acceptent d’être relogés ailleurs que dans les zones rouges. Les autres n’ont le droit à rien mais beaucoup refusent d’être déplacés comme par exemple Carla Pata, la fille d’un pêcheur dont la maison a été détruite. « Ils nous ont dit que c’est interdit de reconstruire ici, mais dans le coin on est tous pêcheurs, déplore la jeune femme. On ne peut pas être relogés plus haut, de quoi est-ce qu’on va survivre ? Si on part loin du bateau, ils vont nous voler le matériel de pêche ».
Si l’élevage n’a pas été touché, le tourisme est en berne comme l’explique Félix Cedeno, un habitant de la petite ville de Canoa : « Le village récupère mais lentement. Les touristes reviennent peu à peu pour voir l’état des infrastructures et notamment des hôtels qui ont presque tous été détruits. S’ils voient que ceux qui restent ont des fissures, ils ne rentrent pas. Ils passent la journée à la plage et ils s’en vont. »
L'activité reprend difficilement
Les éleveurs de crevettes ont également du mal à relancer leurs piscines. Freddy Bonilla est l’un d’entre eux et il déplore le manque d’aide. « Ici personne n’est venu. Tous mes collègues qui font de la crevette ont le même problème. Certains ont perdu beaucoup plus que moi et leurs piscines sont vides. Il n’y a pas d’argent pour réparer, se désole-t-il. On nous propose des crédits mais quand on va à la banque, ils demandent des garants, des papiers qu’on n’a pas. » « Notre projet a été emporté par le tremblement de terre, poursuit sa femme Vicenta. C’est la nature c’est sûr mais cette piscine c’était notre rêve et notre travail. »
Un rêve auquel ce couple s’accroche encore. Si la situation ne s’arrange pas, ils ont toutefois décidé de partir s’installer en Espagne.