Débat présidentiel américain: les erreurs à ne pas faire

Le premier des trois débats à mettre aux prises Hillary Clinton et Donald Trump se déroule cette nuit sur le campus de l’université Hofstra, près de New York. Compte-tenu du ton très dur de la campagne, le face à face s’annonce tendu, ce qui augmente les chances que l’un ou l’autre des candidats – voire les deux – commette une grosse boulette. A la lumière des débats précédents, voici quelques erreurs à éviter.

Négliger les détails : le 26 septembre 1960, le premier débat télévisé de l’Histoire tourne à l’avantage du démocrate John F. Kennedy en grande partie à cause de l’image renvoyée par Richard Nixon, lequel part déjà avec un déficit sur le plan de l‘allure et du charisme. Convalescent (il se relevait d’une infection), Nixon n’est pas au mieux, une apparence rendue encore plus maladive par le fait qu’il a refusé d’être maquillé (pour faire comme Kennedy qui n’a pas besoin de fond de teint car bronzé comme un surfeur) et qu’il transpire sous les projecteurs. Pour ne rien arranger, Nixon s’est cogné et s’est fait mal au genou dans le studio avant d’entrer sur le plateau. JFK remportera l’élection six semaines plus tard. Ceux qui n’avaient écouté le débat qu’à la radio avaient pourtant estimé que c’est Nixon qui avait été le meilleur mais Kennedy avait fait la différence sur son apparence.

Persister dans l’erreur : il faut attendre 1976 pour voir à nouveau un débat entre deux candidats et le président sortant. Le républicain Gerald Ford va payer cher le fait de l’avoir accepté. Alors qu’il jouit d’une bien meilleure notoriété que son adversaire Jimmy Carter, Gerald Ford commet une bourde monumentale en affirmant : « Il n’y a pas de domination soviétique en Europe de l’Est », une assertion d’autant plus surprenante qu’il avait signé les accords d’Helsinki sur la sécurité et la coopération en Europe l’année précédente. Au lieu de reconnaître son erreur, Ford insista en assurant que la Pologne la Roumanie et la Yougoslavie étaient « débarrassés de toute interférence soviétique », un jugement qui porta un coup fatal à sa crédibilité auprès de nombreux téléspectateurs.

Etre pris au dépourvu : après un premier débat lors duquel il est apparu usé et fatigué, en 1984 Ronald Reagan semble diminué au moment d’affronter une deuxième fois le candidat démocrate Walter Mondale. La presse l’a égratigné après sa prestation et la question de son âge – 73 ans – fait débat. Lorsque le sujet est abordé durant le face à face, Reagan est touché par la grâce et délivre cette réplique qui fera date : « Je ne vais pas faire de l’âge un sujet de débat dans cette campagne. Je ne veux pas exploiter à des fins politiques la jeunesse et l’inexpérience de mon adversaire ». Reagan a fait mouche : le public est hilare et Mondale lui-même ne peut s’empêcher de rire. En vieux showman, Ronnie a gagné la partie et s’est mis le public dans la poche.


Se montrer condescendant
: cela ne les pas empêché d’être élu par la suite mais George Bush père et Barack Obama se sont un peu laissés aller face à des femmes lors de deux débats décisifs. Lors d’un face à face pour la vice-présidence en 1984, George Bush père s’était montré condescendant envers Geraldine Ferraro, première femme à figurer sur un « ticket » pour la Maison Blanche aux côtés de Walter Mondale. « Laissez-moi vous instruire, Madame Ferraro, sur la différence entre l’Iran et notre ambassade au Liban » avait notamment insisté Bush Sr. En 2008, dans un rare moment d’inélégance, Barack Obama avait pour sa part répondu durant un débat qu’il trouvait Hillary Clinton « assez sympathique », juste après que celle-ci ait avoué le trouver pour sa part « très sympathique », preuve qu’il ne faut pas toujours dire ce que l’on pense.

Manquer de caractère : dire la vérité ne suffit pas d’ailleurs, tout dépend de la manière dont on la dit, le démocrate Michael Dukakis en a fait l’amère expérience lors de son débat face à George Bush père en 1988. Alors qu’on lui posait, de façon très abrupte il est vrai, la question de savoir s’il changerait d’avis sur son opposition à la peine de mort si son épouse Kitty était violée et assassinée, Dukakis commit l’erreur de répondre sur un ton très neutre : « Non pas du tout, et je pense que vous savez que je me suis opposé à la peine de mort toute ma vie ». Beaucoup attendaient qu’il s’offusque devant le manque de tact de son interlocuteur et non qu'il réponde de façon monocorde. Ce manque de réaction lui fut aussitôt reproché, confirmant son image de candidat terne et manquant de caractère.

Avoir l’air de s’ennuyer : « It’s the economy, stupid » fut le mantra de Bill Clinton durant la campagne de 1992, un détail qui parut échapper à George Bush père lorsque celui-ci fut pris en flagrant délit de regarder sa montre alors qu’une intervenante (le public pouvait poser des questions selon le format de ce débat-là NDLR) posait des questions au candidat démocrate sur ses difficultés à joindre les deux bouts. L’effet fut désastreux pour le président sortant qui perdit l’élection. En 2000, c’est au contraire Al Gore qui pâtit de son impatience lors de son débat face à George W Bush. On le vit plusieurs fois pousser des soupirs quand son adversaire s’exprimait, confortant ainsi son image de vice-président pédant et ennuyeux.

Avoir un trou de mémoire
: on souhaite pour elle que cela ne se reproduise pas cette nuit mais Hillary Clinton, pourtant « secretary of State » (ministre des Affaires étrangères) durant les quatre ans qui suivirent, fut incapable de prononcer correctement le nom du président russe Dmitri Medvedev lors de son débat pour l’investiture démocrate face à Barack Obama en 2008. Après s’y être reprise à deux fois, elle fit référence à « Dmitri Medvedeva ou peu importe ».
Pire encore que mal prononcer un nom : oublier son programme. C’est ce qui est arrivé en 2012 à Rick Perry lors d’un débat pour l’investiture républicaine. Au moment d’énumérer les trois ministères qu’il supprimerait s’il était élu à la Maison Blanche, il cita celui du Commerce, puis celui de l’Education mais fut incapable de se souvenir du troisième. Cela ne l’empêcha pourtant pas de remporter l’investiture, mais d’être sévèrement battu ensuite par Barack Obama.

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