Non sans angoisse, les sympathisants de Bernie Sanders, réunis à Santa Monica en Californie, ont attendu le discours de leur champion mardi soir, alors que les premières tendances dans cet Etat, mais aussi au Nouveau-Mexique et dans le New Jersey, avaient poussé sa rivale, Hillary Clinton, à revendiquer un peu plus tôt l'investiture démocrate pour la Convention de Philadelphie.
Alors que la course à la Maison Blanche va entrer dans sa deuxième phase - un duel entre Hillary Clinton et Donald Trump -, Bernie Sanders, qui ne pourra plus revenir dans le jeu, a rappelé le poids qu'il pèse désormais dans le Parti démocrate : « Nous avons gagné 22 Etats durant ces primaires, et notamment avec le vote des jeunes. Notre vision, une vision de justice économique, sociale, raciale et environnementale, sera l'avenir de l'Amérique », a-t-il prophétisé.
De quoi ne pas baisser la garde, et surtout prendre le temps de négocier, peut-être, pour qu'une partie de son programme soit reprise dans la mouture finale de ses amis démocrates pour la présidentielle. Certes, « nous n'allons pas permettre à Donald Trump de devenir le président des Etats-Unis », a promis Bernie Sanders. « Mais notre vision va au-delà du fait de combattre Donald Trump. Nous voulons transformer notre pays », considère-t-il.
Et le sénateur du Vermont a donc annoncé, sous les acclamations, qu'il maintenait sa candidature contre Hillary Clinton dans la primaire démocrate : « Mardi prochain, nous allons continuer à participer à la prochaine primaire à Washington DC », assure celui qui se qualifie lui-même de « socialiste démocratique ». « Je suis assez bon en mathématiques, et je sais que le combat qui nous attend est très, très difficile. Mais nous continuerons à nous battre pour chaque voix et chaque délégué ! »
Bernie Sanders espère pouvoir renverser le choix des « super délégués ». Mais une grande majorité d'entre eux se sont ralliés à Hillary Clinton et n'en changeront probablement pas. Force est de constater que les résultats de mardi, en Californie notamment, constituent une claque pour le sénateur du Vermont. Les sondages avaient certes prédit une probable victoire de Mme Clinton, mais une victoire serrée. Or, la victoire est ample pour sa rivale, y compris à Los Angeles.
Sanders suit sa route... jusqu'à quand ?
Dans ce « Super Tuesday », qui a vu six Etats se prononcer au total, la défaite de Bernie Sanders en Californie est d'autant plus cinglante qu'il avait tout misé sur ce grand Etat peuplé de la côte ouest, fief du Parti démocrate depuis 20 ans. Le challenger d'Hillary Clinton y a passé les deux dernières semaines, menant une campagne acharnée, convaincu de pouvoir l'emporter. Il avait besoin de cette victoire pour persuader les « super délégués » de changer leur fusil d'épaule. Force est de constater qu'il s'agit d'un échec.
A Los Angeles, explique notre correspondante sur place, Tessa Grauman, les drapeaux, les pin's, les t-shirts et posters à l’effigie de « Bernie » étaient visibles partout ces derniers jours. Et l’annonce de la victoire assurée d’Hillary Clinton dans la course à la Maison Blanche, la veille du scrutin, a énervé beaucoup de soutiens du sénateur. Ils y ont vu un coup des Clinton pour dissuader les pro-Sanders de se déplacer pour voter. Ils auront donc beaucoup de mal à se rallier à la candidate démocrate, préférant pour l'heure prendre leur champion au mot lorsqu’il assure qu’il n’abandonnera pas.
A sa demande, pourtant, Bernie Sanders rencontrera Barack Obama à Washington dès ce jeudi, comme l'a fait savoir la présidence américaine. Officiellement, il s'agit de « poursuivre leur conversation sur les enjeux importants de cette élection » de novembre prochain. Mais certains voient là un possible « début de la fin » de la campagne du sénateur du Vermont. Et dès lors, ce sont désormais les électeurs, les sympathisants de Bernie Sanders, qui font l'objet de toutes les convoitises.
Dans son discours, mardi soir à Brooklyn, Hillary Clinton ne s'y est pas trompée, félicitant son rival pour « sa campagne extraordinaire », selon ses propres mots. Et l'ex-First Lady a passé en substance le message suivant à ses électeurs : je vous ai entendus, j'ai compris vos préoccupations, je vous défendrai. « Nous sommes plus forts ensemble », a prévenu la candidate démocrate, alors que Donald Trump a d'ores et déjà lancé sa propre « opération séduction » à l'adresse des partisans de M. Sanders.
Il ne sera probablement pas facile de convaincre les sympathisants du sénateur du Vermont de se rallier automatiquement à la cause Clinton. Aux Etats-Unis, beaucoup voient en elle la représentante d'une élite politique située loin, très loin du difficile quotidien des classes moyennes et défavorisées. C'est à ces électeurs déçus du double mandat de Barack Obama que s'adresse désormais aussi Donald Trump, les enjoignant à tout faire, non pas pour l'empêcher lui d'accéder à la Maison Blanche, mais bien pour l'empêcher elle, Hillary Clinton, d'y parvenir.