Avec notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio
La loi sur la régularisation des immigrés est donc bel et bien enterrée. Barack Obama, frustré et impuissant, l’a reconnu lundi 30 juin 2014 : les républicains ne voteront pas sur ce dossier cette année.
James Cohen, professeur au département du monde anglophone à l’université Paris 3, pointe l’intransigeance des républicains au sujet de l’immigration et des politiques de développement :
« Aux Etats-Unis et à Washington, notamment, on ne pense jamais en termes de co-développement ou de quoi que ce soit de ce genre. On part du principe que nos frontières sont nos frontières, et que les pays d’Amérique centrale se débrouillent, pourvu qu’ils ne nous envoient pas trop d’immigrés. C’est avec cette attitude que l’administration Obama doit composer d’une certaine façon, parce qu’ils ne vont pas obtenir la réforme qu’ils appellent de leurs vœux depuis cinq ans déjà. Les républicains sont absolument décidés à ne rien laisser passer, à ne régulariser personne en attendant d’avoir le projet qu’ils veulent. »
Les Etats-Unis font face à un afflux jamais égalé d’enfants non accompagnés à la frontière Sud. Douze millions de migrants sans-papiers attendent une régularisation promise depuis le premier mandat. Les expulsions se multiplient.
« Je vais prendre de nouvelles mesures pour réformer, personnellement »
La colère, à son comble dans la communauté latino-américaine - très active -, a incité Barack Obama à agir, à quatre mois d’élections de mi-mandat qui risquent de voir les républicains gagner au Sénat.
« L’Amérique ne peut pas attendre indéfiniment que (les républicains) agissent. C’est pourquoi aujourd’hui, je vais prendre de nouvelles mesures pour réformer, personnellement, autant que mes attributions le permettent, le système d’immigration, sans le Congrès. Si le Congrès ne veut pas faire son travail, nous pouvons au moins faire le nôtre », a-t-il déclaré.
Les ministres de la Justice et de la Sécurité intérieure ont jusqu’à la fin de l’été pour proposer des mesures applicables par décret. Mais en attendant, et après cette mise en cause très directe, rien ne dit que la Chambre des représentants votera la rallonge de 2 milliards de dollars demandée par la Maison Blanche pour faire face à l’urgence de l’afflux de mineurs à la frontière Sud.
Entre octobre 2013 et mai 2014, plus de 47 000 mineurs non accompagnés ont tenté de passer clandestinement la frontière Sud des Etats-Unis. Le professeur Cohen revient sur les causes de cet afflux :
« En Amérique centrale, ils ont l’impression qu’ils peuvent être accueillis et qu’ils peuvent obtenir un statut, parce qu’il y a un programme qui a été initié par l’administration Obama, il y a deux ans, pour des mineurs déjà aux Etats-Unis. Mais ceux qui arrivent maintenant, non accompagnés, ne peuvent pas bénéficier de ce programme. Donc, il y a de fausses rumeurs qui circulent en Amérique centrale, et il y a apparemment des réseaux qui en profitent, en prenant de l’argent aux familles, pour assurer soi-disant l’arrivée de ces enfants. »