Avec notre correspondante à Washington, Anne-Marie Capomaccio
Le débat ne fait que commencer et la polémique est double : la négociation par l’intermédiaire du Qatar et les délais d’information du Congrès. Explications.
Le dialogue entre Washington et les talibans était rompu depuis 2012. Le nouveau contact entre le Qatar et les ravisseurs, ces dernières semaines, a été tenu secret pour ne pas engendrer de faux espoirs.
Barack Obama, informé par Doha, a pris la décision d’accepter l’échange mardi dernier : la vie du prisonnier de guerre contre cinq responsables talibans emprisonnés à Guantanamo.
Les forces spéciales ont récupéré Bowe Bergdahl, samedi matin heure de Washington. C’est seulement à son arrivée sur la base de Bagram que les responsables du Congrès ont été informés, c'est-à-dire juste avant que les cinq détenus ne soient mis dans un avion, direction le Qatar, a indiqué la Maison Blanche. La règle prévoit pourtant trente jours de préavis. Le président afghan a été le dernier à être mis dans la confidence.
«Un prisonnier de guerre»
Pour de nombreux républicains du Congrès qui se sont exprimés à l’annonce de la libération du soldat Bergdhal, le dogme américain « pas de négociation avec des terroristes pour récupérer des otages » a été violé. Mike Rogers, président de la Commission du renseignement à la Chambre des représentants ne décolère pas : « Quand vous négociez, vous envoyez un message à tous les groupes d’al-Qaïda, montrant que les otages ont de la valeur à présent, alors qu’ils n’en avaient pas jusque-là », a-t-il déclaré sur CNN.
En face, pour tenter d’enrayer les critiques, le ministre de la Défense s’abrite derrière les conventions de Genève : il s’agit, dans le cadre d’une guerre, d’un échange de prisonniers.
Chuck Hagel a nié, dans un entretien avec la chaîne NBC, toute négociation avec al-Qaïda. Les Etats-Unis sont en guerre, dit-il, et les conventions de Genève codifient les règles d’échange de prisonniers. « Avant toute chose, nous n’avons pas négocié avec des terroristes, le sergent Burghal était un prisonnier de guerre, et je pense que ce que nous avons fait, en aucune manière n’encourage les terroristes », a-t-il déclaré.
Si les élus républicains sont extrêmement critiques, la réaction de joie des associations qui représentent les 21 millions de vétérans, atténuent les aigreurs des politiques. Le mantra de l’armée « ne jamais abandonner un de ses hommes » a été respecté, quel qu’en soit le prix.