Alors que les représentants de plusieurs pays de l'Unasur (Union des nations sud-américaines) se sont réunis, jeudi 4 juillet, à Cochabamba, en Bolivie, pour « revoir le rapport avec les pays européens », la colère grandit dans la région contre la décision jugée surréaliste d'interdire le survol par l'avion du président Evo Morales de la France, de l'Italie et du Portugal. Le prétexte : Evo Morales, qui était en Russie, aurait amené à bord l'informaticien Edward Snowden, toujours à l’aéroport de Moscou. Cette rumeur, finalement fausse, a pourtant créé un sérieux imbroglio diplomatique.
« Des excuses ? France, Italie et Portugal, allez vous faire f... », s'emporte un internaute brésilien sur Facebook, ce qui montre bien le sentiment général des Latino-américains face à cette incroyable affaire. Le sujet est devenu viral ces derniers jours sur les réseaux sociaux, et pour une bonne partie des internautes, montre le « mépris des nations développées » ou encore « une démonstration de racisme et de violence, montrant que l'Europe se sent supérieure au reste du monde, comme cela a été le cas tout au long de l'Histoire. »
Un « grave outrage » au droit et aux pratiques internationales
Les chefs d'Etat de la région ont soutenu Morales, y compris la présidente brésilienne, Dilma Rousseff, alors que le Brésil est connu, diplomatiquement parlant, pour plutôt avoir tendance à vouloir apaiser les esprits. Dans un communiqué diffusé en anglais, portugais et espagnol sur le blog officiel de la présidence et sur Twitter, le gouvernement brésilien « exprime son indignation et condamne la situation embarrassante à laquelle le président Evo Morales a été exposé ». Le texte souligne aussi que la décision d'interdire le survol de l'avion du chef d’État bolivien représente un « grave outrage » au droit et aux pratiques internationales.
« Le vol d'Evo et la stupidité européenne »
L'attitude des autorités françaises a aussi été critiquée par la presse brésilienne. Dans une tribune publiée dans le quotidien Folha de S. Paulo, intitulée « Le vol d'Evo et la stupidité européenne », le journaliste Clovis Rossi explique que, sous la pression des États-Unis, la France, l'Italie et le Portugal ont fabriqué une crise « idiote », qui risque d'avoir des conséquences, par exemple, dans les négociations au sein de l'OMC pour la création d'une zone de libre échange entre l'Union européenne et le Mercosur.
« Cela ne sert à rien maintenant que le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius appelle son homologue bolivien David Choquehuanca pour s'en excuser et insinuer que le président François Hollande n'était pas au courant de cette décision de fermer l'espace aérien français à Morales », écrit-il. Quoi qu'il en soit, la polémique est loin d'être terminée.