De toutes les promesses non tenues de Barack Obama, c’est sans doute celle qui aura le plus marqué son premier mandat : la non-fermeture du camp de Guantanamo reste, aujourd’hui encore, une tâche indélébile sur son bilan. Une tâche que le président démocrate aimerait effacer avant la fin de son second mandat.
Il faut dire que Guantanamo a été l’un des marqueurs, avec le retrait des troupes américaines en Irak, de la campagne menée par Barack Obama pour emporter la présidence.
Dès 2007, alors qu’il n’est pas encore investi par le Parti démocrate et qu’il bataille avec Hillary Clinton pour arracher l’investiture de son parti, il place le sujet en tête de ses préoccupations. « Notre légitimité est amoindrie quand nous gardons ouvert Guantanamo, déclare, en juin 2007, celui qui n’est encore que sénateur de l’Illinois. Cela nous dessert lorsque nous prétendons agir au nom de principes moraux universels. »
Efforts torpillés
Une fois élu, le 4 novembre 2008, Barack Obama se donne un an pour faire fermer le camp . « J’ai répété plusieurs fois que j’ai l’intention de fermer Guantanamo, et je vais tenir cet engagement, affirme-t-il lors d’une interview accordée à la chaîne de télévision CBS deux semaines après son élection. J’ai répété plusieurs fois que l’Amérique ne torture pas, et je vais m’en assurer… Tout cela fait partie de notre effort pour restaurer la stature morale de l’Amérique dans le monde. »
Mais Barack Obama va se heurter à de nombreux obstacles administratifs et juridiques, et surtout à l’hostilité farouche des élus républicains, et de certains élus de son propre camp.
En mettant en avant le risque que ferait peser sur la sécurité des Américains le transfèrement des détenus, les congressistes républicains vont torpiller tous les efforts déployés par la Maison Blanche pour supprimer le camp militaire.
« Je ne veux pas qu'ils meurent »
En janvier 2013, la Maison Blanche renonce à remplacer Daniel Fried, l’envoyé spécial du département d’Etat pour la fermeture de Guantanamo. Et Barack Obama se résoud à promulguer une loi qui interdit le financement des transferts à l’étranger ou aux Etats-Unis.
Le président américain semble alors s’être résigné à l’impossibilité de fermer le camp, mais un élément nouveau va changer la donne : la grève de la faim qui débute en février dans le camp, et qui va toucher un nombre croissant de détenus.
A la fin du mois d’avril, la situation empire et devient critique pour une vingtaine de prisonniers, que l’armée américaine décide d’alimenter de force. « Je ne veux pas que ces personnes meurent, explique le locataire de la Maison Blanche le mardi 30 avril. Le Pentagone essaie de gérer la situation du mieux qu’il peut, mais je pense que nous devrions tous réfléchir à pourquoi nous faisons cela. »
« Inefficace et coûteux »
Pour Barack Obama, la situation des détenus va donc justifier un nouvel effort pour tenter de fermer le camp. Mais cette fois, le président américain va insister sur des arguments différents pour convaincre ses concitoyens, et infléchir la position des élus républicains.
Comme dans ses précédentes déclarations, il évoque l’impact négatif de Guantanamo pour l’image et la stature des Etats-Unis dans le monde. Mais il avance également des arguments plus pragmatiques : « Guantanamo n’est pas nécessaire pour la sécurité de l’Amérique… Cela coûte cher, c’est inefficace et c’est un outil de recrutement pour les extrémistes. »
Le lendemain, la Maison Blanche annonce qu’un nouveau responsable pourrait être prochainement nommé pour travailler sur la question épineuse du transfert de détenus. Ce nouvel effort et ces déclarations seront-elles suivis d’effet ?
Une parole restée lettre morte
Pour les organisations de défense des droits de l’homme, qui réclament la fermeture immédiate du camp, il est à craindre que ces nouvelles promesses restent lettre morte, comme les précédentes.
« C’est une bonne chose qu’il renouvelle sa volonté de fermer le camp, reconnaît Geneviève Garrigos, la présidente d’Amnesty International France, mais on se pose de véritables questions quand ont voit qu’une centaine de personnes sont encore détenues alors qu’elles ont été reconnues comme libérables. Nous pourrons y croire lorsqu’on aura un plan qui sera présenté par le président. En tous cas, jusqu’à présent ses paroles n’ont pas été suivies d’actes. »