Avec notre correspondant à Caracas, Pierre-Philippe Berson
Ils sont un millier débout sur la place. Tous ou presque portent un objet ou un vêtement à l’effigie de Hugo Chavez. Certains ont un bandeau qui leur barre le front, avec ce message « Chavez toujours parmi nous ».
La foule est calme et silencieuse. Quelques « viva Chavez » sont scandés ça et là. Mais le cœur n’y est pas. Douglas Gutierrez a la casquette du Comandante vissée sur la tête. Il a fait deux heures de route depuis sa lointaine banlieue pour venir dans le centre historique de Caracas, il retient ses larmes avant de parler : « Aujourd’hui on pleure la disparition physique de notre leader, de notre Comandante. Mais je veux vous rappeler que ses ordres restent bien présents,
qu’il reste vivant dans nos coeurs. A Chavez, je veux lui dire, au-revoir camarade ! Le combat continue ».
Le gouvernement vient de décréter 7 jours de deuil national. Les écoles et les administrations seront fermées. Le pays va fonctionner au ralenti. Douglas s’est promis de revenir tous les jours sur cette place. Lui et les autres aimeraient rester ici toute la nuit. Mais Caracas devient dangereuse le soir venu. Alors, drapeaux sous le bras, ils repartent chez eux. Pour faire le deuil à la maison, en famille. Comme s’ils avaient perdu un proche.
Les anti-Chavez
Dès l’annonce du décès, quelques habitants de Caracas n’ont pas pu contenir leur joie. Avec des klaxons et un grand sourire, ils reçoivent la nouvelle comme une victoire. Dans l’est de la capitale, dans les zones chics avec ses villas surprotégées et ses voitures de luxe, Hugo Chavez était détesté.
Ses nationalisations, ses expropriations et ses discours virulents contre la bourgeoisie étaient perçus comme des déclarations de guerre permanente. Miguel Gonzalez est un jeune étudiant anti-chaviste radical. Il a accueilli la nouvelle avec le sourire : « Je me suis dit Woua…Enfin ! En ce moment, j’ai plusieurs amis qui trinquent et qui célèbrent le décès de Chavez. Moi non, parce que ça ne ce fait pas, et aussi parce que j’ai peur. Qu’est-ce que va se passer pour le pays ? Il va peut-être y avoir un coup d’Etat… ».
Le leader de l’opposition Henrique Capriles a lancé un message d’unité au pays. Le chef de la MUD, une vaste coalition de centre-droit a adressé un message de solidarité à tous partisans d’Hugo Chavez.
Ces appels à l’union sacrée ne devraient pas durer longtemps, la Constitution prévoit la tenue d’une nouvelle élection dans les 30 jours qui suivent la mort du président.