Derrière le duel qui oppose Barack Obama à son adversaire républicain Mitt Romney pour la présidence des Etats-Unis, un autre match se joue : celui entre leurs épouses. C’est à celle qui parviendra à donner la meilleure image de son mari pour lui assurer la confiance des Américains et les voix qui lui manquent.
Ainsi, lors de la convention démocrate organisée mardi 4 septembre à Charlotte, en Caroline du Nord, Michelle Obama s’est attachée à montrer que l’homme en qui les Américains ont cru en 2008 n’avait pas changé. « J’ai vu de mes yeux qu’être président ne change pas la personne que vous êtes, cela révèle qui vous êtes », a-t-elle déclaré, avant de poursuivre : « En tant que président, tout ce que vous avez pour vous guider, c’est vos valeurs, votre vision, et les expériences qui dans votre vie ont fait ce que vous êtes ». Succès assuré.
Une semaine plus tôt, le 28 août, Ann Romney avait pour mission – beaucoup plus difficile – de rendre sympathique son mari, souvent perçu comme étant froid et distant. « Ce soir, je veux parler d’amour », avait-elle lancé en préambule. Et de raconter 43 ans de mariage avec un homme « chaleureux, aimant et patient ». « A chaque tournant de notre vie, cet homme que j'ai rencontré lors d'une soirée dansante au lycée, a aidé à tirer les autres vers le haut. Il l'a fait lors des Jeux olympiques de Salt Lake City, quand beaucoup voulaient abandonner. C'est l'homme dont l'Amérique a besoin », avait-elle affirmé.
L’importance de la famille
Si les deux femmes ont tenu leur rôle à merveille, c’est Michelle Obama qui a su être la plus convaincante. Car l’épouse de l’actuel président bénéficie d’une cote de popularité considérable, qui oscille entre 65% et 70% d’opinions favorables, soit 20% de plus que son mari. « Michelle Obama incarne parfaitement l’image de la mère de famille. Elle est élégante, engagée dans des causes sociales. Elle véhicule l’image d’une famille modèle dont elle est le point d’équilibre », remarque Roger Persichino, chercheur associé à Sciences Po et auteur de Les élections présidentielles aux Etats-Unis, joint par RFI.
La famille, voilà l’une des valeurs principales qu’un candidat à la présidentielle américaine doit incarner. A son épouse alors de montrer qu’il est un mari et un père aimant, et un bon gestionnaire des affaires familiales. « Les Américains ont besoin d’un chef, quelqu’un capable de tenir les rênes du pays et de le relever de la crise économique », explique à RFI Dominique Simonnet, co-auteur du Guide des élections américaines 2012. Mais pas seulement. Dans une campagne présidentielle dominée de plus en plus par l’argent et la communication, les électeurs recherchent également l’authenticité et se méfient des personnages fabriqués qui adaptent leurs discours à leur auditoire. « Il y a un intérêt grandissant pour ce qu’il y a derrière. L’enjeu est alors de montrer que le candidat est une personnalité morale dans le privé », poursuit Dominique Simonnet.
Un rôle récent
Les femmes d’homme politique n’ont pas toujours eu un rôle aussi important dans la carrière de leurs maris, comme le rappelle un article du Washington Post. Jusqu’au XXe siècle, elles restent dans l’ombre. Certaines, comme Mary Lincoln, font de rares apparitions au balcon de la Maison Blanche, ou écoutent aux portes, comme Edith Roosevelt, épouse de Theodore Roosevelt. Avec le développement des médias, elles deviennent de plus en plus présentes dans la sphère publique. Jackie Kennedy fait ainsi régulièrement la couverture des magazines Life ou Time. « Si elle incarne parfaitement l’image de first lady idéale, Jackie Kennedy n’a pas du tout pesé dans la campagne de 1960 », tempère Roger Persichino. Il faut attendre 1992 pour que le rôle d’épouse de candidat à la présidentielle prenne l’ampleur qu’on lui connaît maintenant. Cette année-là, Barbara Bush prononce un discours lors de la convention du parti républicain dans lequel elle tente de mettre en valeur les qualités de son mari pour lui rallier l’électorat féminin. En vain.
Depuis, toutes les épouses de prétendant à l’investiture suprême se prêtent à l’exercice, avec plus ou moins de réussite. Certaines, comme Hillary Clinton, ont révélé de véritables talents politiques, jusqu’à tenter elles-mêmes leurs chances dans la course présidentielle. « Après un Noir président des Etats-Unis, le prochain défi est une femme présidente des Etats-Unis. Mais la candidate devra elle aussi montrer qu’elle est une bonne mère et une épouse aimante », conclut Dominique Simonnet.