Le Mexique se prépare à un retour au pouvoir du vieux Parti révolutionnaire institutionnel

Dimanche 1er juillet, les Mexicains élisent leur nouveau président. C’est une élection à un tour, à la majorité simple. La Constitution interdit à Felipe Calderon de briguer un second mandat. Les sondages prédisent un changement au pouvoir. Après douze ans d’absence, le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) pourrait faire son retour aux affaires nationales, même si les deux autres candidats veulent encore y croire.

Depuis des mois, Josefina Vazquez Mota sillonne le pays avec son bus de campagne. La candidate du parti au pouvoir, le Parti action nationale (PAN), est face à un dilemme : comment faire valoir son expérience au gouvernement tout en se démarquant de son mentor, Felipe Calderon ? Beaucoup de Mexicains tiennent le président sortant pour responsable de la forte augmentation de la pauvreté et de la violence dans le pays.

Pour lutter contre ces fléaux, Josefina Vazquez Mota propose d’investir dans l’enseignement. Elle veut créer de nouvelles universités publiques, affirmant qu’en tant que « première femme à occuper le poste de secrétaire de l'Éducation publique du Mexique » elle connaît la solution pour arriver à l’égalité des chances et à la justice dans ce pays : l’éducation.

Pour « une république amoureuse »

Mais son discours a du mal à convaincre les électeurs qui veulent tourner la page du parti conservateur. Du coup, c’est le candidat de la gauche, Andres Manuel Lopez Obrador, dit « Amlo », qui monte dans les sondages.

Apprécié des étudiants et des intellectuels, Lopez Obrador est considéré par ses détracteurs comme un populiste avec des penchants autoritaires. Pour protester contre sa défaite lors de la dernière élection présidentielle en 2006, il a fait bloquer l’axe principal de Mexico, paralysant ainsi la ville pendant des mois. Cette action impopulaire lui a coûté cher, et il a dû arrondir les angles. Aujourd’hui, Lopez Obrador propose une « république amoureuse », une rénovation du pays dans l’ordre et sans violence.

L’ancien maire de Mexico est crédité de 30% d’intentions de vote, talonnant le favori, le candidat du PRI, Enrique Peña Nieto. Selon Lopez Obrador, les élections ne sont pas encore jouées : « On nous a fait croire, avec un tapage médiatique incroyable, que le candidat du PRI a déjà gagné. C’est un scénario digne d’une télénovela », dit Lopez Obrador.

Sans le dire expressément, il espère profiter du mouvement étudiant qui a bousculé la campagne présidentielle. Ces dernières semaines, des milliers de jeunes sont descendus dans les rues pour protester contre le retour du PRI au pouvoir. Mais ils n’ont pas réussi à mobiliser un électorat plus large. Leur mouvement « Yo soy 132 » , « je suis 132 », n’a pas vraiment influencé le cours de la campagne électorale.

Enrique Peña Nieto, le nouveau président du Mexique ?

Du coup, le candidat du PRI peut compter sur une large victoire. Enrique Peña Nieto, c’est le visage jeune et télégénique d’un vieux parti, le Parti révolutionnaire institutionnel, qui a régné sans partage sur le Mexique pendant plus de 70 ans. Accusé de corruption et d’autoritarisme, le PRI a été renvoyé dans l’opposition en 2000.

Douze ans après, la formation revient avec, à sa tête, un ancien avocat de 45 ans, style gendre idéal. L’ancien gouverneur de l’Etat de Mexico cultive l’image d’un homme simple. Il reconnaît n’avoir lu que peu de livres dans sa vie et il veut surtout faire oublier le passé de son parti. Notre projet, dit-il, est « un projet qui n’exclut personne, un projet démocratique dans lequel nous engageons notre responsabilité ».

Le PRI et le mythe de l’âge d’or

Peña Nieto, très populaire parmi les Mexicains plus pauvres, a présenté un programme à forte tonalité sociale. Cela explique son succès, mais pas seulement, estime Alain Musset, géographe et anthropologue, spécialiste du Mexique à l’EHESS* : « Le PRI peut incarner pour un certain nombre de personne une époque de stabilité et de tranquillité, une époque qui n’était pas encore marqué par le problème du narcotrafic et de la violence à grande échelle. » Pour Alain Musset, ce mythe de l’âge d’or permet au PRI de bénéficier d’une « bonne image malgré les accusations de corruption qui continuent à peser sur lui ».

Selon récente enquête, les Mexicains considèrent Enrique Peña Nieto comme le candidat le plus corrompu. Mais si les sondages disent vrai, c’est lui qui succédera, ce dimanche 1er juillet 2011, à Felipe Calderon à la tête du Mexique.

Les électeurs seront aussi appeler à renouveler le Parlement. Ce qui fait que, pour la première fois depuis 1997, un parti risque de disposer de la présidence et d’une majorité pour mener la politique promise : diminuer la violence et combattre la pauvreté.

 

* EHESS : École des hautes études en sciences sociales

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