Le départ de Carol Bartz n'est pas une surprise. De nombreuses rumeurs l'évoquaient ces dernières semaines. En juin dernier, elle avait obtenu un sursis. Les membres du conseil d’administration avaient bon gré mal gré voté la prolongation de son mandat. Mais ces mêmes actionnaires ont précipité il y a quelques jours son limogeage au regard des résultats en Bourse de l’entreprise. Certains avaient même décidé de traîner Yahoo! devant les tribunaux.
Les raisons d’un échec annoncé
Pour résumer l’affaire, il y a deux ans et demi, Carol Bartz a été placée au poste de PDG pour booster les performances du portail. Mais elle n'a rempli qu’une partie de ce contrat. Yahoo! a bien un bénéfice net en hausse de 11% au second trimestre. Mais voilà le problème de fond reste intact : depuis sa création en 1995, Yahoo! n'a jamais évolué et les services qui ont fait fureur au départ de la société, comme Yahoo! Mail ou Yahoo! Messenger, sont passés au second plan au profit de Facebook ou de Gmail de Google. Et puis, internet et ses usages ont changé depuis 1995. La durée de fréquentation du site a baissé d'un tiers depuis début 2009 et Yahoo! se fait distancer chaque jour un peu plus par le géant Google qui, lui, a tout compris et ne cesse d’innover.
Condamné à disparaître ?
Même les pionniers ne sont pas éternels. Rappelons-nous du portail américain AOL qui était, en 1995, le grand concurrent de Yahoo! C’est une histoire de technologie : commencer par innover pour capter des utilisateurs, ils finissent toujours par se lasser. Par comparaison, Apple, qui est revenu sur le devant de la scène numérique, n’a pu le faire qu’en inventant un nouvel usage de la téléphonie avec son iPhone. Rebelote avec la tablette magique iPad. Il ne se passe pas un an avant que la firme à la pomme ne vous propose un produit et des services révolutionnaires. Et là il ne s’agit que de high-tech. C’est pire dans le monde de l’internet. L’exemple nous est donné par Google qui crée chaque mois des dizaines de nouveaux services, la plupart ne trouvent pas l’adhésion du public, seuls quelques-uns rencontrent le succès. Et surtout Yahoo! s’est enfermé lui-même sur la notion de portail. Pas de réseaux sociaux pour les abonnés. On ne peut échanger dans les forums de discussion qu’avec les habitués de Yahoo!, c’était ce qui se passait il y a 20 ans, la firme n’a pas su investir le fameux web 2.0 qui permet de gérer des communautés d’utilisateurs et qui accepte tout le monde.
Yahoo! Entre « être et avoir été »
Yahoo! est coté en Bourse, a investi dans la publicité avec ses régies et même dans le contenu avec Yahoo! Actualité. Mais il ne suffit pas d’acheter, d’investir, de faire du partenariat et de proposer du contenu. Il faut laisser aussi l’utilisateur libre de porter les couleurs de sa marque internet. Où sont les blogs Yahoo! ? Où sont les réseaux sociaux Yahoo! ? Où sont les événements 100% Yahoo! ? Ne pas faire participer l’internaute au succès de sa marque vous condamne à disparaître à brève échéance.
Le poids d’un pionnier du web
Yahoo! pèse encore 17 milliards de dollars. En fait, c’est la fuite en avant. Sa stratégie est claire : il faut trouver un gros partenaire. On parle déjà de Microsoft avec lequel le portail a signé un accord dans la publicité, ce même Microsoft qui voulait racheter Yahoo! en 2008 pour 45 milliards de dollars en action. Trois ans plus tard, Yahoo! est affaibli et une nouvelle offre d’acquisition semble bien improbable. Etre et avoir été sont bien deux choses différentes. Aux dernières nouvelles, on annonce aussi la décrépitude de Facebook, les notifications de « I like » qui a fait le succès du géant bleu sont en perte de vitesse vertigineuse, peut-être est-ce le début de la fin et dans moins de dix ans nous parlerons du réseau de Mark Zuckerberg comme quelque chose de génial mais de largement dépassé…