Hugo Chavez l'a affirmé jeudi soir : depuis l'hôpital cubain où il se remet de ses deux opérations, il est resté « à la tête du gouvernement » vénézuélien. Il n'a donc pas songé à appliquer l'article de la Constitution de 1999 qui prévoit que le vice-président se substitue à un président empêché de gouverner. La première personne dans l'ordre d'une éventuelle succession précipitée, ce serait pourtant lui, Elias Jaua, le vice-président plutôt effacé qu'Hugo Chavez s'est choisi.
Mais il y a aussi quelques fortes personnalités dans l'entourage du chef de l'Etat absent. Dans sa famille d'abord : Adan Chavez, le frère aîné, a été ambassadeur à La Havane. Gouverneur de l'Etat de Barinas, le bastion familial qui lui a été « légué » en 2008 par le père, il fait figure d'idéologue radical du « chavisme ». Il a même parlé de « lutte armée » en cas d'adversité électorale, à son retour il y a quelques jours d'une visite à son cadet convalescent. Mais la fille d'Hugo Chavez, Maria Gabriela, qui joue à l'occasion les premières dames, est perçue comme tout aussi dure, et de toutes façons inconditionnelle de son président de père.
Parmi les proches, il y a aussi le ministre des Affaires étrangères Nicolas Maduro, et son épouse l'ex-présidente du Parlement Cilia Flores. Les formations de syndicaliste de l'un, d'avocate de l'autre, ont propulsé ce couple au plus près du pouvoir. Enfin, très influent est toujours Rafael Ramirez, qui a la haute main depuis une décennie sur le décisif secteur pétrolier.
La classe politique désarçonnée
Des noms peuvent donc être cités. Mais l'omniprésence depuis douze ans sur la scène politique vénézuélienne d'Hugo Chavez, qui se pose depuis douze ans en homme providentiel, dans la grande tradition continentale des caudillos, laisse augurer de problèmes de relève, si jamais le besoin s'en faisait sentir. Indépendamment de la courte fin de mandat qu'Elias Jaua pourrait en ce cas être appelé à assurer jusqu'en janvier 2013, il n'y a pas véritablement de dauphin attitré et certains analystes prédisent déjà une féroce lutte de pouvoir.
L'absence du n°1 Vénézuélien a déjà provoqué le report d'une célébration que le pouvoir érigeait en une sorte d'apothéose régionale. Le 5 juillet, jour du bicentenaire de l'Acte d'Indépendance rédigé à Caracas contre la tutelle coloniale espagnole, devait symboliquement se tenir, dans l'île vénézuélienne de Margarita, le sommet fondateur de la CELAC (Communauté des Etats latino-américains et caribéens), nouveau bloc régional destiné à affranchir, dans l'esprit d'Hugo Chavez et de certains de ses pairs, le sous-continent de l'emprise nord-américaine.
Le sentiment de vide politique qui a semblé désorienter depuis le 10 juin tant le gouvernement que l'opposition au Venezuela est d'autant plus frappant que ce pays, confronté à de nombreuses difficultés économiques malgré ses ressources pétrolières, entre dans une période pré-électorale cruciale pour l'avenir de la « Révolution bolivarienne » instaurée par Hugo Chavez. Une nouvelle élection présidentielle se tiendra dans un peu plus d'un an, fin 2012. Après avoir fait adopter un amendement constitutionnel, le président s'apprêtait à briguer un nouveau mandat qui serait pour lui le quatrième à la magistrature suprême.