La dauphine du si populaire président Luiz Inacio Lula da Silva aura eu une difficile campagne ; en dents de scie. Inconnue de la population, n´ayant jamais participé à aucune élection, cette ministre et femme de confiance de Lula avait, en quelques mois, réussi à se hisser au premier rang des sondages, pour être créditée d´une victoire au premier tour.
Mais l´ancienne militante d´extrême gauche, guérillera qui avait choisi la clandestinité contre la dictature militaire, femme à poigne aux idées progressistes, a subi de violentes attaques conservatrices qui avaient affaibli sa candidature aux lendemains du premier tour. Des rumeurs ont accusé Dilma Rousseff d´être favorable à l´avortement, de vouloir « tuer des bébés », sur Internet on appelait « à brûler une sorcière le 31 octobre, jour d´Halloween », et on assurait qu´elle souffrait à nouveau d´un cancer, comme l´an dernier à la même époque.
Après l´irruption de Dieu et de la morale, le Pape Benoît XVI a tenu, du Vatican, à quelques heures du vote, à dénoncer les projets qui visent à dépénaliser l´avortement ou l´euthanasie. Cible des conservateurs chrétiens et évangéliques dans le premier pays catholique du monde, Dilma Rousseff a dû renier des positions anciennes. Se dire catholique pratiquante et s´engager à ne pas légaliser l´IVG ou le mariage homosexuel.
Les militants du PT et leurs alliés ont alors repris leur mission, à travers le mouvement ‘Acorda Brasil’ (Réveille-toi Brésil), destiné à rappeler les acquis, sociaux notamment, des années Lula (2003-2010).
L´écart de 14% qui séparait les deux adversaires au soir du premier tour, serait le même.
José Serra n´est pas parvenu à bénéficier de la surprise provoquée par le ballotage. Pourtant, tous les grands noms du Parti social-démocrate se sont mobilisés aux côtés de l´ancien ministre et gouverneur de Sao Paulo. A commencer par l´ancien président Fernando Henrique Cardoso, qui vendredi dans Sao Paulo, a mené la marche de l´opposition conservatrice au coeur de son fief. Contestant les sondages, le camp des ‘Toucans’ se dit « confiant dans la victoire ».
Passées les attaques conservatrices, les candidats se seront opposés sur des thèmes moins irrationnels : mode de croissance du pays, privatisations, éducation. Pour contrer les mesures sociales extrêmement populaires du gouvernement sortant, José Serra a surenchéri, proposant d´augmenter les retraites, la Bourse famille qui serait étendue à 15 millions de foyers.
Mais José Serra n´a pas encore publié son programme de gouvernement, par crainte, explique-t-il, d´être copié par le PT. Dilma Rousseff a, elle, pris 13 engagements, tous pour prolonger des politiques sociales déjà mises en place sous Lula. Elle veut, encore, prioriser l´éradication de la misère, qui touche près de 20 millions de personnes.
La loi « Ficha limpa » finalement appliquée
Cette loi approuvée par le Congrès sous la pression populaire de 1,8 million de signatures, devait écarter du scrutin tous les candidats « com ficha suja » ; comdamnés en justice. Mais des dizaines de personnes s´étaient présentées, en contestant la constitutionnalité de la loi.
La Cour suprême, amputée d´un de ses 11 membres, a finalement pris position, bien après le premier tour : la loi de la « ficha limpa » s´applique à ce vote.
Des élus, comme l´ex-sénateur Jader Barbalho de Belem, qui a reçu 1,7 million de bulletins, ne sont pas éligibles.
Une victoire des citoyens contre des responsables politiques qui, même condamnés pour malversations, corruption ou crime, se faisaient élire, et bénéficiaient de l´immunité liée à leur fonction.