«Arrêtez de geindre»: le président Bolsonaro fustige les mesures locales face au Covid

Avec plus de 260 000 victimes du coronavirus et des records de mortalité ces derniers jours, le Brésil s’enlise dans la crise sanitaire. Certaines régions ont donc pris des mesures de confinement pour tenter de freiner l'épidémie. Et pour la première fois, à Rio, bars et restaurants devront fermer à 17h et un couvre-feu est mis en place.

Les bars étaient animés jeudi soir dans le quartier de Tijuca à Rio de Janeiro, rapporte notre correspondante Sarah Cozzolino. Carlos et ses amis buvaient leur dernière bière avant la fermeture dès 17h décidée à partir de ce vendredi. Mais ils soutiennent les nouvelles restrictions. « Ici à Rio, on a été beaucoup trop détendus. Les gens vont à la plage, organisent des fêtes, les bars sont bondés. On n’est vraiment pas un exemple pour le reste du monde, souligne-t-il. Donc, ce couvre-feu va être une étape importante pour la ville. »

Une étape bien trop timide pour Andreia, qui regarde les bars de loin, sur la place où elle promène son chien. « Je pense que ça devrait être plus drastique, au moins à court terme, estime-t-elle. Mais on n’a pas de gouvernement... Donc, c’est une situation très triste, hyper angoissante. »

Mauvaise gestion

Mais pour Rafael, patron de bar, le problème, c'est avant tout la mauvaise gestion de la pandémie. « Ça ne sert à rien de fermer les bars et restaurants si tout le reste ne change pas : les agglomérations dans les transports publics qui fonctionnent mal, les hôpitaux de campagne qui ont été fermés... »

Les travailleurs informels seront aussi touchés. Sans les bars sur cette place, Lidia ne pourra pas tenir son petit stand de trampoline pour enfants, car les rues deviendront trop dangereuses. « Pour ceux qui ont des économies, ce n’est pas grave. Mais pour ceux qui n’ont rien, qui doivent travailler pour manger et payer leurs factures, c’est eux qui vont en payer les conséquences », regrette-t-elle. Depuis la pandémie, et avec la fin de l’aide d’urgence, les familles brésiliennes n’ont jamais été aussi endettées. 

Le Brésil, pays le plus endeuillé au monde après les États-Unis, a annoncé mercredi son plus fort bilan de décès en 24 heures, avec 1 910 morts. Et Rio n'est pas la seule ville à avoir pris des mesures pour tenter de freiner l'épidémie. D'autres ont aussi décidé de confiner localement. 

« On n'est pas des mauviettes »

Des mesures qui ont d'ailleurs provoqué la colère du président Bolsonaro, qui juge qu'elles risquent de mettre l'économie à genoux et sont donc, selon lui, contre-productives, rapporte notre correspondant à Sao Paulo, Martin Bernard. Jair Bolsonaro a abordé la situation sanitaire en marge de l’inauguration d’une voie ferrée dans l'État du Goais, dans le centre du pays. « Nous devons faire face à nos problèmes. On n’est pas des mauviettes. Arrêtez de geindre, a lancé le président. Jusqu’à quand vous allez chialer ? Que va devenir le Brésil si on décide de s’arrêter ? ». 

Mais certains alliés commencent à le lâcher, comme le ministre de l’Économie lui-même, qui insiste sur l’importance de la vaccination alors que le Brésil a, pour l’instant, vacciné moins de 5% de sa population. Le président du Sénat, Rodrigo Pacheco, a également lancé un appel au ministère de la Santé. « Montrez que vous n’êtes pas négationnistes à travers vos actes, en servant d’exemples à la population brésilienne », a-t-il exhorté.

De son côté, l’Association brésilienne des victimes du Covid-19 a refusé de polémiquer, en affirmant que le président Bolsonaro était souvent mal compris.

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