Algérie: un an après la prise d'otages sanglante d'In Amenas

Il y a un an, dans le grand sud algérien, un groupe terroriste attaquait l'immense site gazier d'In Amenas. 37 otages ont été tués dans cette opération qui a duré 3 jours. Et plus de 30 terroristes ont été abattus. En tout, 700 personnes, 550 algériens et 132 occidentaux, travaillaient sur le site. Aujourd'hui, l'Algérie qui défend sa stratégie militaire a renforcé sa sécurité aux frontières sud et est du pays. Retour sur un macabre anniversaire.

En un an, l’Algérie a d’abord réorganisé sa sécurité. Plus de 20 000 hommes ont été déployés le long des frontières libyennes et maliennes. Les villes de Ouargla et Tamanrasset, à plus de 1 000 km de la capitale, sont devenues des bases pour les forces militaires. Des mesures plutôt efficaces, puisque plusieurs convois de terroristes ont été interceptés entre le sud et la frontière libyenne.

La sécurité a également été renforcée sur les bases de vie des sites d’exploitation d’hydrocarbure. La presse rapporte que les employés sont désormais cantonnés dans leur logement quand ils ne travaillent pas.

La sécurité renforcée

Côté officiel, une enquête judiciaire est en cours. Et la semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a pris la parole. Il s’est attaqué aux médias étrangers et a dénoncé « une agitation tendancieuse ».

Il répond à ceux qui lui ont reproché la gravité du bilan de la prise d’otage. Le ministre insiste sur le fait qu'aucune négociation n’était possible avec les terroristes, et souligne que l’armée algérienne avait fait ce qu’il fallait.

Enfin, le journal El Fedjr révèle que 104 employés algériens pris en otage avaient demandé leur intégration dans l’entreprise Sonatrach. Une intégration qui leur a été refusée.

Trois jours de terreur

Il est 5h40 ce mercredi matin du 16 janvier 2013,  lorsque dix pick-up pénètrent dans l'immense complexe gazier. Le commando d'une trentaine de combattants se sépare en deux. Un premier groupe attaque un bus chargé de transporter du personnel, un second détachement coupe l'électricité puis prend le contrôle de la base de vie des salariés.

Les expatriés et les travailleurs locaux sont séparés. Les jihadistes, qui revendiquent rapidement leur appartenance au groupe de l'ancien émir al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Mokhtar Belmokhtar, connaissent très bien les lieux Ils déploient leur matériel : fusils d'assauts, lance-roquettes, missiles et explosifs. Le commando, déterminé, est prêt à tenir un long siège. Des témoins affirment qu'une trentaine d'otages sont d'ailleurs équipés de ceintures d'explosifs.

Tentative de fuite

A l'extérieur, les forces de sécurité algériennes bloquent l'ensemble du site, les liaisons téléphones, internet et satellites sont coupées.

Le lendemain, le jeudi matin, un convoi de cinq 4X4 tente de quitter le site. A bord, des combattants mais également des otages. Les hélicoptères de combats frappent et mettent fin à cette tentative de fuite.

Dans la foulée, l'assaut est lancé sur la base de vie, puis le vendredi, dans la plus grande confusion sur le site de production. Des otages parviennent à s'enfuir, d'autres sont tués dans les combats. Le samedi midi, après 72 heures de prise d'otages, les autorités algériennes indiquent que le site est sous contrôle.


 ■ ZOOM : Mokhtar Belmokhtar, l'instigateur

L'attaque avait été revendiquée par « le groupe des signataires par le sang », le groupe formé par Mokhtar Belmokhtar. Surnommé « le borgne » ou « Mister Marlboro », en raison de son implication dans le trafic de cigarettes, Belmokthar avait rompu avec Aqmi cinq mois plus tôt.

Il est alors en concurrence directe avec eux et souhaite obtenir la reconnaissance d'al-Qaïda. Son nouveau groupe formé en août, al-Mourabitoune demeure une menace sérieuse contre les intérêts étrangers dans la bande sahélo-saharienne.

Au cours du premier semestre 2013, Mokthar Belmokthar a orchestré, outre In Amenas, trois attaques d'envergure  au Niger. Son ancien groupe des « signataires par le sang » a en effet revendiqué le double attentat, le 23 mai, à Agadez et à Arlit, puis l'attaque, le 1er juin, à la prison de Niamey. Contrairement à Aqmi, les katibas de Belmokthar ont minimisé les pertes durant l'opération Serval au Mali en poursuivant une stratégie d'évitement.

Etre adoubé par al-Qaida central, en Afghanistan et au Pakistan

En août, ses brigades ont fusionné avec le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'ouest, (Mujao), pour former al-Mourabitoune avec l'ambition de mener un jihad 'de l'atlantique au Nil', c'est-à-dire sur une zone bien plus large que celle d'Aqmi, en développant ses multiples réseaux notamment en Egypte et au Soudan.

Al-Mourabitoune n'a mené aucune opération spectaculaire au cours des sept derniers mois, sans doute suite à l'action des services antiterroristes occidentaux, qui suivent le groupe de près. Le général américain David Rodriguez, patron d'Africom, a indiqué depuis le Pentagone, la semaine dernière, qu'il était en capacité d'organiser une opération du type In Amenas ou Westgate.

Al-Mourabitoune n'a pas de problèmes d'argent ni de matériel, grâce à la contrebande et aux jihadistes de l'ex-Mujao qui prélèvent une importante dîme sur le trafic de stupéfiant. 

Mokhtar Belmokhtar, de sources sécuritaires, a plusieurs fers au feu. La plupart de ses projets portent sur des opérations d'envergure contre des intérêts français en Afrique, car il souhaite à tout prix être adoubé par al-Qaida central, en Afghanistan et au Pakistan.

Partager :