A bien des égards, le nouveau gouvernement ressemble beaucoup à l'ancien. La plupart des ministres issus de l'équipe sortante sont reconduits, et la coalition entre islamistes et leurs deux alliés de centre gauche est identique. Malgré ses efforts, Ali Larayedh, nouveau Premier ministre, a échoué à élargir cette alliance à d'autres partis que le CPR du président Moncef Marzouki, et Ettakatol.
Mais Ennahda a tenu promesse : son influence est réduite dans une équipe au sein de laquelle les quatre portefeuilles régaliens vont à des indépendants peu connus mais consensuels. L'Intérieur est confié à un magistrat, le très respecté Lotfi Ben Jeddou, qui avait enquêté sur les morts tombés sous les balles de la police de Ben Ali à Kasserine, auteur d'un mandat d’arrêt contre le ministre de l’Intérieur de l'époque. Aux Affaires étrangères, un ancien ambassadeur ; et à la Justice, un avocat et universitaire.
En revanche, la nomination de Rachid Sabagh, ex-président du Conseil supérieur islamique, à la Défense, a suscité quelques réserves sur sa neutralité. Autre concession d'Ennahda à ses alliés, l'éviction du très contesté gendre de Rached Ghannouchi, le chef d'Ennahda, Rafik Abdesselem. Il est empêtré dans diverses polémiques et était jusqu'à présent chef de la diplomatie. Cette équipe doit maintenant passer sous les trois jours par le vote de confiance de l'Assemblée.
Les enjeux du nouveau gouvernement
Formé après la démission du précédent, suite à l'assassinat de l'opposant Chokri Belaïd,
le nouveau gouvernement doit apaiser une crise politique aigüe. Devant l'explosion de la violence, l'opposition exige des mesures concrètes comme la dissolution des ligues de protection de la révolution accusées d'être des milices liées au pouvoir islamiste, ce à quoi Ennahda s'est toujours montré réticent.
La nouvelle équipe devra aussi faire face à la multiplication des caches d'armes de guerre dans le pays et aux accrochages de plus en plus fréquents entre groupes armés jihadistes et forces de l'ordre.
Côté économie, les attentes sont nombreuses également. L'équipe sortante n'a pas su inverser la courbe du chômage qui touche encore plus de 40% des jeunes dans certaines régions intérieures où l'exaspération sociale est immense.
Autre chantier, celui de la Constitution préalable à tout agenda électoral. Sa rédaction cumule déjà plus de 6 mois de retard. Autant de défis à relever avec une équipe fort similaire à la précédente.