Dans la ville conservatrice de Derna, les élections sont très attendues

J moins un pour les élections générales en Libye. Des élections particulièrement attendues à Derna, ville la plus conservatrice de Libye, et berceau des djihadistes. Mouammar Kadhafi avait organisé une vague d’arrestations sanglantes en 1996, ce qui avait étouffé les organisations politiques islamistes de cette ville située à 300 kilomètres de Benghazi. Avec les élections, les islamistes ont refait surface et espèrent bien décrocher la mise dans cette ville de plus de 100 000 habitants.

Avec notre envoyé spécial, Nicolas Champeaux

Abdallah Hauti adopte un ton grave quand on lui demande s’il ira voter demain: « Je voterai en mémoire de mon frère qui a été torturé par les hommes de Kadhafi en 1995, il est mort car il a rejoint les combattants islamistes qui demandaient la liberté ».

« Les islamistes de Derna qui ont survécu au règne de Kadhafi sont avec le parti Justice et reconstruction des Frères musulmans », explique le cheick Saleh Bala, croisé au souk. « Avant,  fonder un parti était un acte de trahison poursuit le cheick, tous les membres de la liste de Justice et reconstruction de Derna ont goûté à la prison, sauf les femmes » précise le cheick, barbe blanche et gilet orné de délicates broderies bleues. Les femmes seront-elles dans les bureaux de vote de Derna, ville d’hommes dévots ? « Cela dépend de leurs maris, s’ils ne sont pas d’accord elles n’iront pas », assure un retraité.

« Ce sont des égoïstes, rien dans le coran ni dans les actes du Prophète interdit le vote des femmes », s’indigne une étudiante qui ne votera sans doute pas pour les Frères musulmans. « Mais ils ont réussi en Egypte, corrige Faraj El Medi, et nos sorts sont liés, s’ils n’avaient pas réussi leur révolution en Egypte on ne voterait pas ici demain » ajoute ce chauffeur livreur, convaincu comme beaucoup d’autres que les Frères musulmans l’emporteront haut la main à Derna. Ils se sont cachés jusqu’à la révolution.
 

 

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