Avec notre envoyé spécial, Nicolas Champeaux
Ils sont environ cinq cent, recroquevillés sur le sable brûlant de la cour, à attendre la distribution de pain. Un homme gémit, allongé de tout son corps, son ami lui caresse le dos. Abdoulaye, venu du Niger, ne s’attendait pas à un tel cauchemar.
« Mon grand frère qui est à Misrata m’avait appelé pour me dire que je pouvais le rejoindre pour travailler, raconte-t-il. Je venais de traverser la frontière quand ils m’ont arrêté et emmené ici. Les conditions ne sont pas bonnes. Il n’y a pas d’eau propre, là où on va chercher de l’eau, c’est là où on va déféquer ».
« A l’intérieur, les lits superposés forment un jeu de cubes que les migrants préfèrent éviter dans la journée, raconte un Togolais au corps émacié. Vous avez vu ? Les militaires portent des masques pour se boucher le nez car l’odeur est nauséabonde. Et l’on risque de contaminer tout le monde parce que nous toussons, crachons par terre ici et là et nous ne lavons pas !
La grogne a gagné ce migrant nigérian arrêté voilà un mois. « Les militaires nous disent que leur gouvernement n’est pas organisé, dans ce cas ils devraient nous relâcher et nous laisser rentrer chez nous !», peste-t-il.
Les militaires de l’ethnie Toubou, qui surveillent les frontières du sud libyen, disent ne recevoir aucune aide de Tripoli. Ils affirment avoir dû cambrioler un dépôt de nourriture pour nourrir les migrants. Ceux du Tchad et du Niger vont être rapatriés, les autres devront encore s’armer de patience.