Egypte : la Haute commission pour l'élection présidentielle annonce la liste définitive des candidats

Ils seront treize, les candidats à la course présidentielle égyptienne qui démarre le 23 mai. Ainsi en a décidé la Haute commission pour les élections présidentielles qui a annoncé la « liste définitive » des candidats. Une commission composée des présidents des principales cours égyptiennes - constitutionnelle, administrative, appel - et dont les décisions sont « blindées » contre toute contestation auprès d’une quelconque juridiction selon l’article 28 de la Constitution intérimaire.

La liste n’a réservée aucune surprise si ce n’est qu’elle a confirmé le retour en grâce du général Ahmad Chafiq, dernier Premier ministre de l’ex président Hosni Moubarak. Exclu mardi 24 avril dans la soirée, il a été réintégré mercredi soir. Entretemps il avait fait appel de la décision de la Commission électorale devant la même Commission électorale. Les avocats de Chafiq ont soutenu que la loi qui a permis l’exclusion du général était anticonstitutionnelle parce que « à effet rétroactif ».

Dix candidats exclus

Le Conseil suprême des forces armées avait approuvé lundi une loi votée par le Parlement et qui privait de leurs droits politiques les hauts responsables du régime Moubarak au cours des dix dernières années : président, vice-président, premiers ministres et cadres supérieurs du parti du raïs déchu sont concernés.

La commission a estimé, à la majorité, que le doute était permis et elle l’a interprété en faveur d’Ahmad Chafiq. La commission a aussi envoyé la loi devant la Haute cour constitutionnelle pour avis. Le président de la Commission électorale a précisé que la réintégration du général Chafiq permettait d’éviter l’effondrement de tout le processus des présidentielles si la loi était jugée anticonstitutionnelle. La loi anti ex-régime votée à la hâte par le Parlement pourrait aussi affecter des hauts responsables toujours en place comme le grand imam de la mosquée d’al-Azhar. Le cheikh Ahmad al-Tayeb, considéré comme modéré, avait brièvement intégré le bureau politique du parti de Moubarak.

Dans sa conférence de presse, la Commission électorale s’est longuement étendue sur les raisons qui l’ont poussée à définitivement exclure dix candidats. L’explication la plus longue a concerné le cheikh salafiste Hazem Abou Ismaïl. Il a été exclu du fait de l’obtention par sa mère de la nationalité américaine alors que la loi précise que les parents du candidat doivent être égyptiens et rien qu’égyptiens.

Des explications qui n’ont toujours pas convaincus les enfants d’Abou Ismaïl qui continuent de manifester place Tahrir. La commission a aussi expliqué que Khairat al-Chate, candidat de la confrérie des Frères musulmans a été exclu pour ne pas avoir récupéré ses droits politiques après sa condamnation pour blanchiment d’argent sous Moubarak. « Le fait qu’il ait été gracié par l’armée ne lui restitue pas ses droits politiques avant le délai légal de six ans », a estimé la commission. Quant au général Omar Soliman, vice président d'Hosni Moubarak, il a été exclu pour un détail technique : il n’a pas réuni au moins mille signatures dans au moins quinze des 27 provinces d’Egypte.

Aboul Foutouh en tête

La liste définitive des candidats comprend trois islamistes, trois divers gauche et deux hauts responsables sous Moubarak. Selon un sondage publié ce mardi par le quotidien Al Masry al Youm Abdel Moneim Aboul Foutouh, exclu il y a un an de la confrérie des Frères musulmans, arrive en tête. Même s’il était considéré comme le libéral de la confrérie, le docteur Aboul Foutouh (il est médecin) a réitéré a plusieurs reprises son attachement aux Frères musulmans et à la charia. Il est talonné de près par Amr Moussa, ex-secrétaire général de la Ligue arabe et ancien ministre des Affaires étrangères. Un centriste qui aurait nettement profité du report de voix en cas d’exclusion du général Chafiq qui arrivait en troisième position des intentions de vote. Les deux hommes sont considérés comme pouvant tenir tête à l’islamisme conquérant.

Vient ensuite Hamdin Sabbahi, un opposant nationaliste à Hosni Moubarak qui pourrait s’allier à deux autres candidats de gauche, Aboul Ezz al-Hariri et Khaled Ali. La gauche, malgré la révolution du 25 janvier reste assez faible du fait de la dispersion des révolutionnaires dans une myriade de mouvements. Mohamed Morsi, candidat du parti Liberté et justice des Frères musulmans n’arrivait qu’en cinquième position dans le sondage. Mais Morsi pourrait toutefois remonter en flèche dans les sondages si les salafistes, qui ne se sont pas encore prononcés, décidaient de le soutenir. Reste qu’il traine un boulet au pied : son absence de charisme. Les jeunes anti-Frères musulmans l’ont d’ailleurs surnommé « roue de secours » et ont manifesté contre lui en brandissant des pneus.

Partager :