Les Bissau-Guinéens sont appelés aux urnes pour élire le successeur de Malam Bacaï Sanhá, décédé le 9 janvier dernier. L’actuel Premier ministre s’est dit d’ores et déjà prêt pour la course électorale si son parti, le PAIGC, le choisit. « Je suis le président du PAIGC, naturellement que je suis son candidat », mais « la décision finale revient à la direction du parti », a ajouté Carlos Gomes Júnior.
Quatre autres responsables du PAIGC ont indiqué qu’ils souhaitent être candidats mais Carlos Gomes Júnior – véritable homme fort de la classe politique – est en théorie le mieux placé.
C’est l’analyse de Vincent Fouchet, chercheur à l'International Crisis Group et auteur d’un rapport qui vient d’être publié sur la situation en Guinée-Bissau, joint par RFI.
Convaincre des segments entiers du PAIGC
Le Premier ministre et actuel homme fort du pays ferait donc figure de poids lourd, mais avant d’être candidat, il devra encore convaincre des segments entiers du PAIGC.
Pour les partisans du Premier ministre, il ne fait guère de doute que l'élection présidentielle devrait consacrer l'hégémonie politique de Carlos Gomes Júnior. En effet, depuis les disparitions des présidents João Bernardo Vieira et Malam Bacaï Sanhá, Carlos Gomes Júnior a cessé d’avoir des adversaires de poids au sein du PAIGC. Certes, ses détracteurs au sein de l’appareil sont nombreux, mais ils sont orphelins et ne disposent ni des moyens ni du poids politique de l'actuel Premier ministre.
De là à en conclure qu'un boulevard s'ouvre pour Carlos Gomes, il n'y a qu'un pas que les plus prudents ne s'aventureraient pas à franchir. Car le chemin est semé d'embûches. Par le passé, l'opposition interne à l’ancien président Nino Vieira, au sein du PAIGC, n'avait pas hésité à manoeuvrer contre lui, en s'alliant, en sous main, avec les partis d'opposition.
Carlos Gomes Júnior va donc devoir tenir à distance l'aile du PAIGC qui ne lui est pas acquise. En outre, il devra également rassurer une partie de l'armée qui redoute cette hégémonie politique de l’actuel Premier ministre. L'opposition de l’ethnie Balante ne cesse en effet d'agiter la menace d'une perte d'influence irrémédiable de cette ethnie, très puissante au sein de l'armée.
Jusqu'à présent, Carlos Gomes Júnior bénéficiait de conditions favorables avec un président Sanhá qui exerçait une sorte de médiation entre les différents secteurs de la vie publique. Avec sa disparition, le risque de radicalisation politique et la tentation de l'aventurisme augmentent considérablement.