A l'énoncé du verdict, le banc de la défense laisse éclater sa joie. Les onze jeunes avocats du barreau de Paris qui viennent de défendre avec succès les premiers pirates jugés en France depuis des siècles, se congratulent, des larmes de bonheur coulent sur leurs joues.
A côté d'eux dans le box des accusés, le traducteur parle le plus vite possible pour annoncer les peines. Les visages des six Somaliens s'éclairent. De sept à huit ans de prison pour les trois pirates partis à l'abordage du Carré d'as. Six ans de prison pour Yacoub Hassan le traducteur.
On est loin des seize ans de réclusion requis par le parquet. Sans compter l’acquittement d’Abdulahi Guelleh, le pécheur de langoustes pris avec les ravisseurs alors qu'il vendait son poisson. Il lui faudra de longues minutes pour comprendre qu'il est libre, libre peut-être aussi de rester en France. Selon son avocat Florent Loyseau de Grandmaison :
« Cette décision lui appartient. Je crois qu’il a décidé de déposer une demande d’asile politique. Vous connaissez l’état de la Somalie aujourd’hui, c’est l’un des pays les plus dangereux du monde. On y vit avec moins de cinq dollars par jour. La moitié des habitants sont armés de Kalachnikov, poursuit-il. Je ne suis pas sur que dans son état, après avoir passé trois ans dans le monde carcéral, la chose la plus indiquée soit qu’il retourne immédiatement en Somalie ».
Carré d'as, le voilier si bien nommé, a finalement porté chance aussi bien à ses propriétaires sortis de l'aventure sans une égratignure qu'à ses pirates, qui échappent à la réclusion à perpétuité.