Au Congo, les pygmées réclament l'application de la loi les protégeant

Les populations pygmées du Congo, menacées d’extinction selon l’ONU, se plaignent d’être traitées en esclaves par la majorité bantoue. Elles réclament l’application de la loi élaborée en 2004 et promulguée par le président de la République en février 2011, censée les protéger.

Adoptée fin 2010 par le Parlement congolais, l’Assemblée et le Sénat, la loi portant promotion et protection des droits des peuples autochtones en République du Congo a été promulguée par le président congolais Denis Sassou Nguesso en février 2011. Si elle a fait naître de nombreux espoirs auprès des populations autochtones, elle tarde à entrer en application, déplorent-elles.

« Nous avons été longtemps maltraités par nos voisins bantous », assure Parfait Dihoukamba, du Réseau national des peuples autochtones du Congo (Renapc). Il constate que les pygmées, peuple autochtone congolais, sont les oubliés de l’histoire du pays.
 

De son côté, Valentin Mavoungou, directeur général des droits de l’homme et des libertés fondamentales au ministère de la Justice congolais constate que « dans le nord du Congo, ils sont considérés comme des esclaves. Quand on arrive au sud, à quelques exceptions près, la situation est la même ». Mais optimiste, il ajoute : « Cette loi va réparer les injustices et les inégalités dont sont victimes les autochtones, un peuple à part entière du Congo ».
 
Valentin Mavoungou souligne une première avancée due à la loi qui vise à ne plus les désigner comme des pygmées, un terme péjoratif et discriminatoire, selon lui, mais comme autochtones.
 
David Lawson, le représentant des Nations unies pour la population (Unfpa ) avait clairement tiré la sonnette d’alarme le vendredi 5 août 2011 avec une déclaration lourde de sens lors d’une conférence-débat sur la mise en œuvre de cette loi sur la protection des peuples autochtones du Congo. « La communauté autochtone congolaise est aujourd’hui en danger d’extinction », avait-il averti.
 

Auparavant, fin 2010, James Anaya, rapporteur spécial de l’ONU sur les droits des peuples autochtones en visite au Congo avait relevé que « les peuples autochtones au Congo vivent dans des conditions de marginalisation extrême ». Il déplore que beaucoup d’entre eux « vivent dans des campements situés à la périphérie des villages, sans accès aux services sociaux de base comme la santé et l’éducation ». Par ailleurs, l’Unicef signale que 65% des adolescents pygmées de 12 à 15 ans ne sont pas scolarisés, contre 39% à l’échelle nationale.

Parfait Dihoukamba, du Réseau national des peuples autochtones du Congo, (Renapc), relate que « pour un champ de 400 mètres à dessoucher, à labourer et à semer, un pygmée n’attend d’un bantou parfois qu’un litre de vin de palme ». Une observation qui évoque la situation sociale critique des Indiens d’Amérique ou des Aborigènes d’Australie ainsi que le fort taux d’alcoolisme dans leurs communautés en perte totale d’identité.

Peuple de forêts par excellence, les autochtones au Congo représentent 43 500 personnes et 2% des 3,6 millions d’habitants, selon le dernier recensement national de 2007. Mais des projets ont contraint de nombreuses communautés à abandonner leurs territoires. En effet, les minces parcelles de forêt qui leur restent ont été détruites par l’exploitation forestière intensive, l’agriculture à grande échelle et les activités commerciales comme le marché du bétail de boucherie, explique le site Survival, spécialisé sur les peuples indigènes.

Ces populations ont perdu leur mode de vie autosuffisant et rares sont celles qui ont reçu des compensations pour cette perte. Pourtant, elles vivent dans un état de pauvreté extrême dans les campements sauvages qu’elles établissent aux limites des terres qui autrefois étaient les leurs.

Pour en savoir plus :


- FIPAC 2011: les droits des peuples autochtones et conservation de la biodiversité du Bassin du Congo

- Les droits des populations autochtones et les dynamiques de la conservation de la biodiversité dans le bassin du Congo

- Reportage Afrique RFI avril 2011 : Congo-Brazzaville : ORA, une école réservée aux autochtones

- Reportage Afrique RFI août 2011 : Brazzaville : journée de solidarité des peuples autochtones

- Le Point juillet 2011 : rencontre avec les derniers chasseurs-cueilleurs de la planète

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