Depuis le début de la période de transition en Tunisie, le pays a connu des sit-in, grèves et manifestations successives. Des revendications politiques, avec la préparation du prochain scrutin électoral, mais également des revendications sociales sont en permanence à l’ordre du jour. Les Tunisiens s’impatientent face au poids du chômage et à des promesses non tenues. Dans ce contexte, le gouvernement de transition tient à garder le contrôle de la rue en ayant notamment recours, de manière ambivalente, à l’état d’urgence proclamé le 14 janvier, toujours en vigueur, et qui limite l’exercice des libertés individuelles, dont la liberté de réunion pacifique.
Coups de poing, coups de matraques, bombes lacrymogènes et bâtons électriques
Les témoignages recueillis par la FIDH à Tunis mais aussi à Siliana et Kasserine, dans le centre du pays, font état d’un usage « disproportionné » de la violence à l’encontre des participants à des manifestations organisées, et de graves violations des droits de l’homme. A Tunis, plusieurs personnes témoignent et racontent comment elles ont été arrêtées et brutalisées par des policiers, pour certains en civil et cagoulés. D’autres racontent avoir vu des policiers frapper des manifestants de manière indiscriminée avec des matraques, y compris des femmes et des enfants.
Des manifestations organisées à Tunis, les 6 et 7 mai dernier, pour demander la démission du gouvernement provisoire ont également donné lieu à de graves violations des droits de l’homme commises par les forces de sécurité. Des vidéos ont notamment circulé montrant des policiers en train de rouer de coups une jeune fille et un enfant, et de nombreux témoignages ont fait état de violences commises notamment à l’encontre de journalistes présents.
Réponse insuffisante des autorités politiques et judiciaires
Le rapport de la FIDH s’appuie également sur des entretiens avec plusieurs personnalités officielles, telles que Habib Essid, le ministre tunisien de l’Intérieur, et Mohamed Cherif, procureur général en charge des affaires judiciaires auprès du ministre de la Justice. La FIDH salue par ailleurs des pas importants du gouvernement comme son engagement à l’ouverture d’enquêtes pour satisfaire le besoin de justice des victimes. Pour la première fois, des tribunaux ont accepté de prendre acte d’allégations de torture et ont ordonné des expertises médicales. Le gouvernement a également souligné l’importance de former les forces de sécurité tunisiennes, pour que de tels actes ne soient plus perpétrés. Mais cela ne peut être considéré comme suffisant.
La Fédération internationale de défense des droits de l’homme demande aux autorités tunisiennes de mettre un terme à la répression des manifestations, de lever l’état d’urgence et d’interdire le port de cagoule par des membres des forces de sécurité intérieure.