Avec nos envoyés spéciaux à Benghazi
Awad a installé son stand de légumes au rez-de-chaussée d’un immeuble en chantier. La construction a été interrompue par la révolution, car tous les ouvriers étrangers ont fui le pays après le 17 février. Il était ingénieur dans la raffinerie de pétrole de Bréga, mais la ville est de nouveau sous le contrôle de Kadhafi. Il vend donc des amandes et des poivrons et ramène deux fois moins d’argent à la maison, mais il n’en a cure. « La liberté importe plus que l’argent, le salaire je m’en fiche », confie Awad.
Autre son de cloche dans ce café juste à l’angle. Amin, le front en sueur, nous montre des documents bancaires. Il avait investi 28 000 dinards libyens, environ 20 000 euros, pour importer du bois d’Europe, mais l’argent est gelé dans une banque à Londres. « Cette liberté commence à me coûter cher », se plaint-il.
Les fonctionnaires aussi commencent à tirer la langue. Toufik fait la queue devant une banque, il n’a pas touché de salaire depuis deux mois. Sous couvert d’anonymat, un ex-officiel du CNT (Conseil national de transition) redoute que les islamistes n’exploitent les frustrations des habitants de Benghazi. Leurs enfants ont déjà manqué quatre mois d’école. Ils doivent chaque jour composer avec des délestages et affronter la hausse des prix.