Aucune explosion de joie, pas de concert de klaxons dans les rues de Tunis ce lundi soir. L’annonce des 35 ans de prison contre Ben Ali et sa femme a été accueillie dans une relative indifférence, en raison de l’absence des accusés.
Les avocats de la défense, eux, dénoncent « une parodie de justice ». Dès le début de l’audience, ils avaient demandé un report pour pouvoir se préparer et « garantir une justice aussi équitable que possible ». Ils ne l’ont pas obtenu, en tout cas dans la première affaire hier. Ils estimaient ne pas avoir eu le temps de se préparer puisque les 5 avocats ont tous été commis d’office trois jours avant le début du procès.
Au tribunal de Tunis, tout est allé très vite avec une décision de justice tombée en quelques heures à peine, dès le premier jour, un scénario que craignaient de nombreux militants des droits de l’homme, anciens opposants à Zine el-Abidine Ben Ali. Pas du tout en raison d’une soudaine compassion pour l‘ancien dictateur, mais simplement pour ne pas lui offrir un argument de plus : celui d’une justice expéditive, peu crédible, lui qui de son exil saoudien dénonce toutes les accusations portées contre lui.
Une première condamnation pour le moment symbolique, mais l’ancien président tunisien est loin d’en avoir fini avec la justice. Car nous n’en sommes qu’au tout début d’une longue procédure judiciaire contre Ben Ali, mais aussi contre son clan. L’ancien président est impliqué dans environ 182 affaires, le chiffre évolue assez souvent. Il doit répondre de plus de 90 chefs d’accusation devant des juridictions civiles mais aussi militaires. Certains de ces chefs sont passibles de la peine de mort, il s’agit des nombreux martyrs de la révolution tombés sous les balles des forces de l’ordre pendant la révolution.
En tout cas, le prochain rendez-vous judiciaire est fixé au 30 juin pour l’affaire du palais de Carthage que le tribunal a accepté de reporter. C’est une affaire de détention d’armes et de drogues retrouvées dans un palais présidentiel.
Et puis, il y a aussi les procédures contre le clan Ben Ali-Trabelsi, une famille tentaculaire, environ 150 membres par filiation ou par alliance. La justice tunisienne les incrimine presque tous dans de nombreuses affaires, près d’une centaine en tout qui sont toujours pour la plupart en cours d’investigation.