En Libye, la stratégie militaire occidentale ne parvient pas à faire la différence

En Libye, Misrata appelle les troupes occidentales au secours. Les rebelles qui contrôlent la ville assiégée demandent une intervention au sol. Londres, puis Paris ont annoncé l'envoi de conseillers militaires mais il n’est toujours pas question d'envoyer des troupes au sol. A Paris, Nicolas Sarkozy a reçu à l’Elysée mercredi 20 avril 2011 le chef du Conseil national de transition (CNT) Moustapha Abdeljalil. La question de l’envoi de troupes au sol a probablement été évoquée entre les deux hommes.

Un mois après le début des frappes aériennes en Libye, sous commandement de l’Otan, Mouammar Kadhafi continue de narguer la coalition internationale. Son fils, Seif al-Islam, a d’ailleurs proclamé un tonitruant « Nous allons vaincre ! » lors d’une émission de télévision mardi soir sur la chaîne Allibya ajoutant que la « situation évolue chaque jour en (notre) faveur ». De leur côté, les rebelles bloqués à Misrata, une ville située à l’est de Tripoli et assiégée par les forces fidèles à Kadhafi, ont lancé un appel à l’aide, pratiquement au même moment, mardi. L’un des chefs insurgés, Nouri Abdallah Abdoullati, a lancé un appel à la presse depuis Misrata en demandant, pour la première fois, l’envoi de soldats français et britanniques au nom de principes « humanitaires ». « Désormais, il s’agit d’une situation de vie ou de mort » a-t-il plaidé alors que d’intenses combats se poursuivent dans la ville avec les forces loyalistes.

Boucliers humains

A l’issue de la rencontre entre le président Sarkozy et le chef du CNT, Moustapha Abdeljalil, le gouvernement français a annoncé l’envoi d’officiers de liaison français auprès des rebelles. « Il y aura un petit nombre d'officiers de liaison, quelques unités, aux côtés du Conseil national de transition (CNT) pour effectuer une mission de liaison afin d'organiser la protection des populations civiles », a affirmé François 
Baroin, le porte-parole du gouvernement français. Selon lui, leur nombre est inférieur à dix. L'Italie a également dit ce mercredi qu'elle envoyait à son tour une dizaine de conseillers militaires auprès de du CNT. Dès mardi, le ministre français des Affaires étrangères avait d’emblée écarté l’idée d’une intervention terrestre prônée également par des députés de l’UMP. Alain Juppé s’est ainsi déclaré « tout à fait hostile » à cette éventualité tout en reconnaissant que la situation militaire sur le terrain était « difficile, confuse » et que, peut-être, a-t-il reconnu, a-t-on « sous-estimé la capacité d’adaptation de Mouammar Kadhafi ». Toujours est-il qu’il a annoncé que la France allait intensifier ses frappes aériennes. Ce n’est pas vraiment ce que pouvaient espérer les insurgés de Misrata qui savent bien que l’efficacité de ces frappes est grandement limitée par l’utilisation de boucliers humains par les troupes kadhafistes comme ont pu le constater encore ce mercredi, des avions de l’Otan au-dessus de Misrata.   
 

Sur la même ligne que Paris, Londres a redit son refus d’envoyer en Libye des forces opérationnelles au sol. Mais la Grande-Bretagne avait cependant annoncé, mardi, l’envoi de conseillers militaires auprès de la résistance libyenne. « Au total, il y aura moins de 20 militaires » pour conseiller les insurgés du CNT « sur la façon d’améliorer ses structures d’organisation militaire, ses communications, sa logistique, ainsi que sur les meilleurs moyens de distribuer l’aide humanitaire et l’assistance médicale » a détaillé le ministère britannique des Affaires étrangères sans toutefois préciser, pour d’évidentes raisons de sécurité, à quelle date ils rejoindraient Benghazi. Sur la BBC, William Hague, le ministre britannique des Affaires étrangères a aussitôt précisé : « Il n'y a pas de soldats (britanniques) sur le terrain, ce ne sont pas des forces de combat britanniques qui partent (...). Il n'y aura pas d'invasion terrestre de la Libye ». Ces conseillers militaires « ne sont pas là-bas - j'insiste - pour entraîner des forces, armer des forces ou prendre part à des combats », a-t-il jugé bon d’ajouter. Pour son homologue libyen, Abdelati Laabidi, l’initiative britannique devrait prolonger le conflit.

Dix mille tués

A cet appel des insurgés de Misrata, l’Otan réitérait dès mardi soir, sa position via la déclaration de sa porte-parole, Oana Lungescu : « Le mandat des Nations unies est clair. Il n’y aura pas de forces d’intervention au sol, on continue avec notre mandat pour faire en sorte de protéger la population civile contre l’agression systématique des forces de Kadhafi ». Une position « dans les clous » qui de toute évidence a eu le don d’agacer Londres et Paris, d’où leurs initiatives. Quant aux Etats-Unis, ils ont remis le 1er avril à l’Otan le commandement des opérations qu’ils coordonnaient lors des premiers jours de l’intervention libyenne. Ils ont réalisé 800 sorties aériennes depuis ce jour mais selon les dires de Joe Bidden, le vice-président américain, les Etats-Unis sont plus utiles sur d’autres théâtres d’opération, comme le Pakistan ou l’Egypte.

Depuis le début du soulèvement en Libye, dix mille personnes ont été tuées et 55 000 ont été blessées selon le Conseil national de transition. 

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