Politiquement la situation commençait à devenir délicate pour Alassane Ouattara. Les premières victimes de la guerre urbaine à Abidjan étant bien évidemment les civils, privés de tout, d'eau, de nourriture, et de médicaments. Il fallait donc rétablir un minimum de sécurité dans des quartiers livrés aux pillards. C'est l'option qui a été choisie. Hier soir dans son discours, le président élu de côte d'ivoire a fixé deux objectifs : la sécurité et le redémarrage rapide des activités économiques.
Pascal Affin Nguessan, ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo et patron du Front populaire ivoirien ne reconnaît aucune légitimité à Alassane Ouattara et le tient pour responsable des malheurs de la Côte d’Ivoire.
Et comme il y a urgence, Alassane Ouattara demande à l'Union européenne de lever le plus rapidement possible les sanctions. A La BCEAO, la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest, il demande de reprendre ses activités en Côte d' Ivoire, afin que les banques puissent procéder au paiement des salaires. Aux industriels pétroliers, il indique qu'ils doivent approvisionner la ville en gaz butane et en carburant...Bref, tout un train de mesures qui visent à soulager une population meurtrie, dans une ville qui a, rappelons-le, a voté majoritairement pour son adversaire Laurent Gbagbo.
Dans ce contexte, la vie reprend très progressivement dans les quartiers qui entourent la base arrière des Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), au nord d'Abidjan, rapporte l'un de nos envoyés spéciaux sur place. On croise sur les routes qui bordent l’endroit de plus en plus de civils. Les vendeuses viennent jusque dans la station service, qui sert de camp, pour proposer leurs produits et de plus en plus d’habitants vont au petit marché, à quelques centaines de mètres de là.
Comme cette femme qui a décidé de sortir aujourd’hui : « C’est la première fois depuis deux semaines que je sors aujourd’hui. J’ai peur encore des jeunes qui ont des armes partout. On a peur de sortir parce qu’on ne sait pas où se trouve le danger. A la maison, c’est très difficile. On vit comme ça : Il n’y a pas d’eau. Tout est dur. Il n’y a pas de courant, on vit comme ça. J’ai été au marché pour chercher du poisson et je n’en ai pas trouvé. Je m’en vais à la maison ».
Les habitants du quartier se plaignent du manque de produits sur les étals et des prix pratiqués par les vendeuses : « On vient du marché, on a pris les sachets pour aller au marché. On ne peut rien acheter. Un petit poisson revient à 1 500 F Cfa, le kilo de riz à 1 000 F Cfa, l’huile à 2 500 F Cfa On ne peut rien payer. On n’a rien. On est surpris, on n’a pas d’argent. On ne peut pas manger avec nos enfants ».
Le problème de sécurité n’est pour l’instant pas résolu. De nombreux habitants se plaignent encore des miliciens pro-Gbagbo qui, disent-ils, « ouvrent le feu sur eux et pillent dans les quartiers ».
Ce jeudi soir, un haut responsable militaire des FRCI nous confiait qu'il avait sans doute sous-estimé la capacité de résistance des derniers fidèles du président sortant, retranché dans sa résidence fortifiée. D'où cette décision de ne pas attaquer pour l'instant frontalement cet objectif, mais d'attendre grâce à un siège militaire, un blocus donc, que Laurent Gbagbo et ses fidèles se rendent.
L'Union européenne espère pouvoir « bientôt » répondre favorablement à Alassane Ouattara, le président internationalement reconnu, qui a demandé, jeudi, la levée de certaines sanctions européennes afin de permettre à l'économie du pays de redémarrer. La France a salué le discours à la nation prononcé par hier par Alassane Ouattara Pour le ministère français des Affaires étrangères, Alain Juppé : « l'ère Gbagbo est close ». Les partisans du président sortant ne l’entendent pas de cette oreille.