Forum social mondial: Abdoulaye Wade suscite la polémique

Alors que les débats et autres conférences se multiplient à l'université Cheikh Anta-Diop de Dakar, l'ancien président brésilien Lula et l'actuel président sénégalais Abdoulaye Wade ont participé à une table ronde à la place du souvenir sur la situation de l'Afrique dans la géopolitique mondiale. Luis Ignacio Lula da Silva y a plaidé pour un développement agricole et une indépendance alimentaire de l'Afrique. Mais pour le président Wade du Sénégal, son pays aurait déjà atteint cet objectif.

Les milliers de participants au Forum social mondial ouvert dimanche à Dakar sont entrés, ce lundi 7 février, dans le vif du sujet. Des dizaines d'ateliers, tables rondes et débats étaient organisés sur le campus de l'Université Cheikh Anta Diop. Et l’ancien président brésilien Lula a fait sensation en participant à l'un des ateliers. Critique et pariant sur l’avenir du continent, il a beaucoup insisté sur les engagements réels à prendre en matière d’agriculture pour combattre la faim.

« L’Afrique a surtout besoin de bâtir son indépendance en matière de production alimentaire. Ce continent a besoin de rompre, une fois pour toute, les liens de dépendance avec les anciennes et les nouvelles puissances coloniales. Il n’y a pas de souveraineté réelle sans sécurité alimentaire. Sans vouloir transposer de modèle, je suis persuadé que l’Afrique réunit toutes les conditions qui lui permettraient de suivre un chemin semblable à celui du Brésil, avec la promotion d’une révolution dans son agriculture. La savane africaine s’étend sur plus de 25 pays, avec des conditions idéales pour alimenter la population de ce continent. Cette savane pourrait permettre à plusieurs pays de devenir des acteurs importants sur le marché agricole international. Mais pour l’instant seulement 10% des 400 millions d’hectares disponibles sont cultivés », a constaté l’ancien président brésilien.

Mais c’est le président sénégalais Abdoulaye Wade qui a déconcerté son auditoire,ce 7 février, en affirmant que son pays est aujourd'hui autosuffisant en matière alimentaire et notamment en riz. « Notre pays était dépendant alimentairement, il y a quatre ans. Nous importions 600 000 tonnes de riz (...) Eh bien aujourd'hui, le Sénégal est autosuffisant. Nous produisons, ici même, tout ce que nous mangeons », a déclaré le président Wade. Mais ces affirmations du président sénégalais ont été immédiatement contestées par de nombreux observateurs et experts. « En matière de riz, de lait, d'huile, d'oignons, de pommes de terre, on est loin de produire suffisamment », a commenté l'économiste sénégalais Moubarack Lô, interrogé par l'AFP.

Toutefois, le directeur général de la Société d'aménagement et d'exploitation des terres du Delta du fleuve Sénégal (SAED), Mamoudou Dème, avait évoqué en janvier une baisse notable des importations de riz. « Au moins la moitié de ce que nous consommons en matière de riz est produit au Sénégal ». Ces bilans officiels sont cependant contestés par des organisations de producteurs et spécialistes de l'agriculture, qui estiment généralement que la production de riz n'atteint pas encore 30% des besoins. Par ailleurs, aucun bilan officiel n'est encore établi concernant une autosuffisance en riz.

Le forum social mondial est aussi l’occasion, pour les participants, de faire un bilan critique des politiques néolibérales en vigueur dans de nombreux pays. Un activiste indien du People’s Health Movement, (le mouvement pour la santé des populations), Amit Sengupta, déplore ce qu’il décrit comme « la stagnation des politiques sanitaires qui s’est produite dans son pays depuis 20 ans ».

 

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