Jusqu’ici les zones touristiques tunisiennes ont été épargnées par les émeutes. Mais jeudi, la station balnéaire de Hammamet a été touchée par les pillages, un poste de police, une permanence du parti au pouvoir ainsi que des résidences cossues ont ainsi été détruits. L'annonce de pillages à Hammamet a suscité une certaine inquiétude parmi les voyagistes européens, et en particulier parmi les tour-opérateurs français, très représentés en Tunisie. Avec un peu plus de 600 000 voyages à forfait (séjours et avion) vendus par an, la Tunisie est, en effet, la deuxième destination des Français derrière l'Espagne.
Les voyagistes français commencent à sentir les premiers effets de cette crise. Fram annonce le chiffre de 200 annulations ou reports à une autre date ou vers une autre destination. Les ventes se tassent également chez Voyamar où les réservations ont été divisées par deux par rapport à l’an dernier. Thalasso n°1 affiche un retrait de moins 30%. Face à ce climat tendu, les voyagistes ne veulent pas céder à la panique. Deux éléments, selon eux, tempèrent ces circonstances. D’une part, janvier est la saison creuse. D’autre part, la Tunisie n’a jamais enregistré d’attaques envers les touristes.
Ralentissement des réservations
Les membres de l’Association française des tour-opérateurs (CETO) et ceux de l’Union des distributeurs du voyage (UDIV), se sont toutefois réunis, vendredi 14 janvier 2001 à Paris, pour adopter une stratégie commune. « Les principales décisions ont été de prévoir des aménagements. Beaucoup de tour-opérateurs ont ainsi prévu des reports possibles de quelques jours pour les clients devant partir ce week-end principalement dans le nord du pays. Les hôtels fonctionnent comme d’habitude, seules les excursions ont été suspendues afin de ne pas prendre de risques inutiles et les voyagistes comme Marmara, Thomas Cook ou Fram ont préféré annuler les circuits », a expliqué René-Marc Chikli, le président du CETO, tout en soulignant que « les voyagistes français restaient vigilants ». Des déclarations du président du CETO faites avant les violents heurts qui se sont produits vendredi après-midi dans la capitale, entre des groupes de manifestants et des policiers, et qui ont été suivis par l'instauration du couvre-feu.
En revanche en Allemagne comme en Belgique, des voyagistes ont décidé, étant donné les derniers affrontements, de rapatrier leurs touristes. La filiale allemande du voyagiste britannique Thomas Cook a rapatrié quelque 2 000 touristes allemands et a annulé tous ses départs jusqu’au 17 janvier. Des voyagistes belges, invoquant les conseils de prudence de leur gouvernement, ont également décidé par précaution d'évacuer d'autorité leurs centaines de clients. Plusieurs vols devaient partir pendant la journée et la soirée de vendredi de sorte que tous les touristes belges soient revenus chez eux pour le week-end.
8% du PIB de la Tunisie
Si de nombreux pays, comme la Suisse, le Portugal, la Belgique, l’Allemagne et les Pays-Bas, recommandent à leurs ressortissants de ne pas se rendre en Tunisie, la France, pour sa part, se contente d’émettre des conseils de prudence : toujours avoir ses papiers sur soi, éviter les foules et les attroupements.
De nombreux responsables tunisiens s’inquiètent des retombées de ces violentes émeutes sur l’image du pays. Le tourisme est, en effet, l’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie du pays. Un secteur qui emploie directement et indirectement près de 400 000 personnes et représente 8% du produit intérieur brut (PIB). Premier pourvoyeur de devises, l’industrie touristique couvre 60% du déficit de la balance commerciale.