Ce 2 juillet, le Ghana affrontera l’Uruguay en quarts de finale de la Coupe du monde 2010 de football. La sélection ghanéenne est la troisième équipe africaine à atteindre ce stade de la compétition après le Cameroun en 1990 et le Sénégal en 2002. Elle pourrait aussi être la première en demi-finales.
Dutalent mais pas seulement
En 1990 puis 2002, Camerounais et Sénégalais avaient brillé grâce à des générations dorées de joueurs. En 2010, ce Ghana aussi est pétri de talent. Mais la qualité de ses joueurs n'explique pas tout.
En termes d’individualités, les Ivoiriens et les Camerounais sont supérieurs aux Ghanéens. Ils ont pourtant quitté ce Mondial 2010 prématurément, même si les Eléphants, tombés dans le « groupe de la mort », ont plus d’excuses à faire valoir que les Lions indomptables.
Une progression constante
Depuis quatre ans, le parallèle entre la Côte d’Ivoire et son voisin est saisissant. Finaliste de la CAN 2006, demi-finaliste en 2008, quart-de-finaliste en 2010, la RCI ne cesse de dégringoler dans la hiérarchie continentale. Le Ghana, lui, a connu une progression constante, passant d’une élimination dès le 1er tour en 2006, à une 3e place en 2008 puis une finale en 2010.
Pourtant, ses meilleurs éléments n’ont pas toujours été au rendez-vous. Stephen Appiah était forfait en 2008 et 2010. Michael Essien a quitté ses partenaires prématurément en Angola et n’est pas présent en Afrique du Sud. Sulley Ali Muntari, indiscipliné, a été écarté en janvier dernier et est relégué sur le banc durant cette Coupe du monde 2010.
Une relève dorée et des « vieux » revanchards
Milovan Rajevac, le sélectionneur du Ghana, a compensé ces absences en accordant sa confiance à la nouvelle garde nationale. Face aux Etats-Unis, le technicien serbe a aligné une formation comptant trois champions du monde juniors 2009, André Ayew, Jonathan Mensah, Samuel Inkoom, et deux espoirs confirmés à la baguette, Kwadwo Asamoah (21 ans) et Kevin-Prince Boateng (23 ans).
Les anciens, Richard Kingson, John Pantsil, Hans Adu Sarpei ou John Mensah ont accepté l’immixtion de ces jeunes car ils partagent avec eux la même rage de gagner. Ce mélange harmonieux s’était déjà révélé efficace lors de la CAN 2010.
Un entraîneur impliqué et respecté
Ce mariage n’aurait toutefois pas été possible sans l’autorité du sélectionneur. Milovan Rajevac n’est ni Guus Hiddink, ni José Mourinho. Il n’a jamais dirigé de grands clubs en France ou en Angleterre comme Paul Le Guen, coach du Cameroun, ou Sven-Goran Eriksson, celui de la RCI, mais n'a pas pour autant subi les mêmes pressions internes que Le Guen, par exemple. Avant de prendre en main les Black Stars, personne ne connaissait cet ex-entraîneur de clubs serbes.
Milovan Rajevac ne parle même pas anglais. Il s’exprime via un compatriote-interprète. Mais certains gestes valent plus que des mots. Il suffisait de voir sa grande satisfaction après la qualification du Ghana pour les demi-finales du… CHAN 2009 (la CAN des locaux). Tandis que le Franco-Bosniaque Vahid Halilhodzic suivait d’un œil distant les performances à domicile de la Côte d’Ivoire B, Rajevac s’impliquait, lui, avec passion, dans le parcours des Black Stars réservistes. Comme il le fait avec les équipes de jeunes.
Une Fédération au service de l’équipe
Confier l’une des meilleures sélections du continent à un quasi-inconnu, après le passage du Français Claude Le Roy, était un pari risqué de la part de la Fédération ghanéenne (GFA). Il a en partie fonctionné parce que Rajevac a été soutenu contre une opinion et des médias sceptiques. Sans parler des premiers concernés, les joueurs.
Ces derniers sont toujours sensibles au palmarès, bref à la légitimité de celui qui les dirige. Ecarté de la liste des 23 pour cette Coupe du monde, Laryea Kingston, l'expérimenté ailier droit, s’en était pris avec véhémence à la crédibilité du sélectionneur. La GFA s’est contentée de nier l'altercation rapportée par la presse et de protéger le groupe, laissant Milovan Rajevac gérer l’affaire. Et pour une fois, l'équipe nationale n'a pas à souffrir des rivalités entre une fédération et un ministère des sports.
Un football cohérent et efficace
Qualité, ambition, constance, respect et implication permettent aux Black Stars de développer un football cohérent et efficace. Le 4-5-1 mis en place par Milovan Rajevac permet aussi bien de contrôler le jeu que de contrer. Face aux Etats-Unis, les Black Stars n’ont pas forcément été les meilleurs. Les Ghanéens ont pourtant su faire plier une équipe qui avait su renverser la tendance face à l’Angleterre, la Slovénie puis l’Algérie, en phase de poules.
Certains joueurs, tel André Ayew ou Richard Kingson, s’expriment d'ailleurs mieux en sélection qu’en club. Un comble comparé aux performances parfois décevantes d’un Samuel Eto’o avec le Cameroun ou d’un Didier Drogba avec la Côte d’Ivoire. Preuve supplémentaire que la Ghana fait figure, à bien des égards, d’exemple à suivre pour toute l’Afrique.