Les géants de l’Internet ont-ils facilité le travail de collecte des données personnelles de leurs utilisateurs par la NSA dans le cadre de Prism, vaste programme d’espionnage mondial des communications électroniques ? En portant plainte contre X devant le tribunal de grande instance de Paris, la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) et la Ligue des droits de l’homme (LDH) s’attaquent au programme de surveillance massive des communications numériques de la NSA et comptent bien faire la lumière sur le rôle joué par les géants de l’Internet dans ce scandale. Google, Yahoo !, Apple, Microsoft, Facebook, Youtube, Skype, Paltalk ou AOL se retrouvent ainsi dans le collimateur des deux associations.
Pour celles-ci, le programme Prism a permis à la NSA et au FBI de collecter des données hébergées sur les serveurs de ces sociétés, sous couvert de lutte contre le terrorisme et de la criminalité organisée, et de scanner les communications échangées sur Facebook, Google ou Microsoft. « Cette intrusion sans contrôle dans le vie de chacun constitue un danger considérable pour les libertés individuelles qui doit disparaître sous peine de voir disparaître l’Etat de droit », soulignent les deux associations dans un communiqué. « On ne peut pas impunément, de manière impériale, projeter sa législation hors de ses frontières sans avoir de comptes à rendre », a ajouté l’avocat de la Ligue des droits de l’homme, maître Michel Tubiana, au Monde.fr.
Cette intrusion aurait été rendue possible grâce à la coopération de ces grands de l’Internet. Ces sociétés « sont susceptibles d’avoir mis à la disposition du FBI et de la NSA leur serveur pour que ces agences de renseignement américaines les pénètrent et puissent s’installer à demeure pour collecter, siphonner toutes les données de tous les clients internautes utilisant les services de ces sociétés », a déclaré l’un des avocats de la fédération internationale des droits de l’homme, maître Emmanuel Daoud, au micro de France Info, jeudi matin.
« La France est un nain politique »
En tant que gardiens des libertés individuelles, également en matière de traitement informatisé, les deux associations pointent plusieurs infractions : accès frauduleux sur un système de traitement de données, collecte illicite de données à caractère personnel, atteinte volontaire à la vie privée, atteinte au secret des correspondances. Une liste à l’image des faits révélés et dilapidés au compte-goutte dans le Guardian, le Washington Post et Der Spiegel par Edward Snowden, l’ancien consultant de l’agence de sécurité américaine (NSA).
Cette offensive prend le contrepied des réactions modérées du gouvernement français suite à la révélation de l’espionnage, dans le cadre du programme Prism, de plusieurs pays européens, d’ambassades et d’institutions européennes. « La France est un nain politique qui n’a pas les moyens de ses indignations », a déclaré maître Emmanuel Daoud au Monde.fr. Mais l’initiative de la FIDH et de la LDH reste relativement isolée pour l’heure. Seule l’association Europe versus Facebook, composée essentiellement d’universitaires autrichiens, s’est lancée dans une démarche similaire en déposant plusieurs plaintes contre les filiales européennes de Facebook, Apple, Yahoo !, Microsoft et Skype pour leur collaboration présumée avec la NSA.
Si les géants de l’Internet ont démenti à l’unisson leur implication dans le programme Prism en niant un « accès direct » des agences de renseignement américaines aux données (messages, vidéos, photos) contenues sur leurs serveurs, ils n’ont pourtant pas abordé d’éventuelles collaborations ponctuelles avec le NSA dans le cadre de procédures judiciaires définies et ne remettent pas en cause l’existence même du programme de surveillance.