Le maillot jaune qu’il porta le 14 juillet ne lui avait pas donné d’aile. De retour en rouge – la couleur de son équipe Lotto-Belisol – Tony Gallopin a retrouvé des couleurs en enlevant la 11e étape, courue entre Besançon et Oyonnax (187 km). Certes, le Français se sentait plus léger après s’être débarrassé de la pesante tunique, mais sa victoire ne fut pas pour autant une promenade de santé, de celle qui échoit aux audacieux les jours où le peloton décide d’accorder des bons de sorties comme on distribue des échantillons gratuits dans une foire.
C’est qu’avec son final façon montagnes russes, la 11e étape faisait de l’œil aux baroudeurs, et nombreux étaient ceux qui l’avaient cochée sur leur calepin comme une occasion de briller avant les Alpes et les Pyrénées. Parmi eux, Martin Elmiger (IAM), Cyril Lemoine (Cofidis) et Anthony Delaplace (Bretagne-Séché). Partis depuis le kilomètre 31, les trois hommes vont aborder la côté de Rogna (3e catégorie), à moins de 60 bornes de la ligne, avec une avance qui a fondu au soleil du Jura – il a fait 30° sur la route. Car dans le peloton, si le maillot jaune Vincenzo Nibali reste bien au chaud entre ses équipiers, on tente aussi de se mettre en évidence. Tom Slagter, Jan Bakelants et Nicolas Roche sortent tour à tour. A la bascule de l’ascension suivante, celle de la côte de Choux (3e catégorie), les voilà en tête avec Elmiger.
Le souffle de Degenkolb sur sa nuque…
L’enchaînement avec la côte de Désertin (4e catégorie), à 35 km de la ligne, permet à Cyril Gautier et Jesus Herrada de rejoindre Elmiger, Bakelants et Roche. Dans ce quinté, un homme va faire une meilleure impression : Nicolas Roche. Orphelin de son leader Alberto Contador, qui a abandonné l’avant-veille, l’Irlandais de Saxo-Tinkoff se sent libre de tenter un coup et part seul au pied de la côte d’Echallon (3e catégorie), dernière bosse du jour. Le but : basculer en tête et débuter la descente finale avec un petit matelas. Mais le matelas va s’avérer trop mince. Avec 12’’, on ne résiste pas au retour des équipes Orica et Cannondale, surtout quand celles-ci collaborent pour sauvegarder les chances de leurs leaders respectifs : Gerrans et Sagan. Encore moins quand Tony Martin, omniprésent et omnipuissant depuis quelques jours, prend les commandes du peloton.
Malgré quelques cassures, le regroupement a lieu avant une ultime bosse non répertoriée, à 12 bornes de la ligne. C’est le moment que choisit Tony Gallopin pour attaquer. La suite se joue dans la descente vers Oyonnax, une descente en forme de course-poursuite à 95 km/h… Et une fois Michael Rogers (Saxo), Michal Kwiatowski (Omega) et Sagan revenus sur Gallopin, à 4,4 km de la ligne, on ne donne plus très cher des chances du Français. Sauf à tenter un ultime et puissant démarrage. C’est ce qui est fait à 2,5 km de la ligne. Pour le bonheur de Gallopin, les trois autres se regardent, personne n’osant se livrer de peur de se faire contrer. Mais à quelques mètres de la ligne d’arrivée, Gallopin sent le souffle de John Degenkolb sur sa nuque. L’Allemand mène un peloton survolté qui conteste jusqu’à la fin la victoire du Français. Décidément plus léger en rouge qu’en jaune, celui-ci résiste jusqu’au bout et enlève le bouquet à Oyonnax, son premier sur le Tour de France.