Le Québec isolé au Canada pour son refus du port du turban sur les terrains de foot

L’Association canadienne de soccer a fait savoir lundi 10 juin dans la soirée, qu'elle avait suspendu la Fédération québécoise car celle-ci continue d’interdire le port du turban par les joueurs de football, alors qu’il est autorisé partout ailleurs au Canada. Un bras de fer s’est engagé. La Première ministre du Québec a estimé que la fédération de sa province a le droit d'établir ses propres règlements. En attendant le Québec risque de se voir exclure des compétions nationales et interprovinciales.

Le débat sur le multiculturalisme au Canada a débordé dans la sphère du sport, et notamment dans le soccer, le nom donné au football dans ce pays. L'Association canadienne de soccer (ACS), qui compte dix fédérations présentes dans chaque province, dont le Québec, a édicté une règle selon laquelle il faut autoriser le port du turban, du patkas et du keski par les joueurs qui le souhaitent. Cette tolérance a été imaginée pour ne pas pénaliser les sikhs.

Le Québec a décidé de faire bande à part

Malgré une directive imposée à l’ensemble des fédérations de football au Canada, la Fédération québécoise a choisi de désobéir et de continuer d’interdire le port de ces signes religieux par les joueurs de soccer, mettant en avant le principe de sécurité des joueurs. Après une mise en demeure le 6 juin dernier restée infructueuse, l'ACS est passée à l’acte. Son président, Victor Montagliani, justifie la décision de suspendre la Fédération québéquoise, « afin d'assurer que le soccer demeure accessible au plus grand nombre de Canadiens ».

« Puisqu'une majorité équivoque de nos (fédérations) membres approuvent notre approche et l'ont mise en œuvre, nous nous attendons à ce que la Fédération de soccer du Québec puisse en faire de même », a ajouté le président de l'ACS qui semble excédé que le Québec veuille faire bande à part et interdise le port du turban sur les terrains de football, alors que le reste du Canada le permet. Avec cette suspension effective depuis le 10 juin, la menace est claire, les Québécois risquent l’exclusion des compétitions footballistiques ayant lieu au niveau national.

Le Québec invoque un règlement de la FIFA

La Fédération québécoise de football de son côté, pense aussi avoir le droit pour elle et campe sur ses positions d’interdiction du port du turban. Les Québécois se réfèrent en la matière au règlement 4 de la FIFA, même si le turban n’y est pas cité explicitement.

Le règlement en question se contente de lister les pièces d’équipement permises sur le terrain de football. Et puisque le turban n’en fait pas partie, la Fédération québécoise de football déduit et juge que cette tenue vestimentaire ne doit pas être autorisée sur le terrain de football. Le Québec semble pourtant isolé dans son entêtement.

Un débat qui enflamme la classe politique

Si la Première ministre du Québec, Pauline Marois a qualifié d'«inacceptable» la suspension de la Fédération québécoise, le reste de la classe politique au Canada qui s’est mêlée au débat, a critiqué le comportement de l'organisation. Une attitude jugée « ridicule »par le ministre canadien de l'Immigration, Jason Kenney.

Au Parlement québécois, le chef de l’opposition Jean-Marc Fournier a même invoqué un autre règlement de la FIFA tolérant envers le port du hijab par les footballeuses pour tailler en pièce les arguments de la fédération québécoise.« La règle, autant pour la FIFA qu’ici au Canada, est de laisser jouer avec le hijab, en vérifiant pendant le jeu les mesures de sécurité pour s’assurer qu’il n’y ait pas de danger, a-t-il fait valoir ». Avant d'ajouter : « honnêtement, je me dis qu’on aurait pu suivre le même raisonnement pour le turban ».

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