Tara: Port-Cros, une secrète richesse sous-marine

Tara a passé la deuxième semaine de mai, du 5 au 19 mai, au mouillage dans le Parc National de Port-Cros. L’île de Port-Cros, première escale de l’expédition, est l’une des quatre îles d’Hyères, un archipel côtier du sud de la France, réputé pour sa diversité biologique sous-marine exceptionnelle.

Cette île est un roman. L’histoire de Port-Cros est pleine de rebondissements. Colonie romaine dans l’antiquité, elle abrite des moines dès le Ve siècle, mais du Xe au XVIe siècle, les pirates barbaresques ravagent et ruinent l’archipel. A partir de la renaissance, le pouvoir français s’y intéresse et trois forts sont construits sous Louis XV pour défendre l’île, pourtant, les Anglais envahissent Port-Cros en 1742. Napoléon les en chasse et y installe une garnison en 1811. Puis, au cours des XIXe et XXe siècles, l’île sera vendue et passera ainsi de mains en mains, jusqu’à son acquisition par Marcel et Marceline Henry en 1921, date à partir de laquelle elle devient un foyer intellectuel qui attirera entre autres Malraux et Gide.

Un parc immergé

Les Henry sont aussi des amoureux de la nature et ils invitent les naturalistes à effectuer sur Port-Cros les premiers inventaires de faune. Sous l’impulsion de Marceline Henry, qui fait donation à l’Etat de son domaine, le Parc national est créé le 14 décembre 1963.

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Le Parc national de Port-Cros recouvre 700 ha de terres émergées pour 1288 ha de surfaces marines, il comprend deux îles, Bagaud et Port-Cros, et deux îlots, la Gabinière et le Rascas, avec un périmètre marin de 600 m de large. Le Parc national fait aussi partie du réseau européen Natura 2000, qui a pour objectif de protéger les habitats d’intérêt communautaire, et, depuis 1999, il assume la coordination du suivi du sanctuaire des mammifères marins, fruit d’un accord entre l’Italie, Monaco et la France.

Une richesse biologique secrète

Au-delà de 40 m de profondeur, les fonds sous-marins de la Méditerranée sont majoritairement couverts de massifs d’algues calcaires dits coralligènes. On les appelle ainsi, car, en mourant, ces algues laissent un dépôt calcaire qui construit, par superposition, des ensembles qui ressemblent aux massifs coralliens. Ces massifs croissent très lentement à l’abri de la lumière - moins d’un millimètre par an. Ils procurent un logement à une faune nombreuse et plus de 1700 espèces - éponges, gorgones, oursins, poissons divers - y ont été observées. C’est donc un milieu très riche, mais en raison de la profondeur, ces massifs et leurs hôtes sont mal connus.

Plonger en eau profonde

L’équipe de Tara s’est associée, pendant l’escale de Port-Cros, avec les plongeurs d’Andromède Océanologie. Andromède Océanologie est une société créée par le biologiste et plongeur Laurent Ballesta. L’équipe d’Andromède - Florian Holon, Mathieu Oriot et Thibault Rauby - a donc plongé entre -40 et -90 mètres, trois fois par jour, avec des scaphandres à recycleur d’air qu’ils ont développés eux-mêmes et des outils océanographiques adaptés pour cartographier précisément ces fonds coralligènes, inventorier les espèces et les photographier. Cette étude a deux buts principaux : préparer la prochaine expédition de Tara en 2015 dans le Pacifique, dédiée à l’étude les coraux, et offrir aux gestionnaires du Parc de Port-Cros une meilleure connaissance de ces habitats ainsi que des pressions qu’ils subissent.

Nombreuses découvertes

En descendant à toute vitesse sur leurs scooters sous-marins, les plongeurs ont été surpris de découvrir, au large de la baie d’Hyères vers 75 m de profondeur et au-delà, des forêts de laminaires– des algues d’un mètre de long, Laminairia Rodriguezii, une espèce proche de celles que l’on trouve d’habitude vers la Bretagne - à perte de vue. Cette découverte en appelle d’autres, que l’inventaire photographique effectué par les plongeurs révèlera, car c’est la première fois que cet écosystème est étudié.

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